Achille MbembeNé au Cameroun en 1957.Il obtient son doctorat en histoire à l'université de la Sorbonne à Paris, en France, en 1989.Par ailleurs il est titulaire d'un DEA en science politique de l'Institut d'études politiques, toujours à Paris.Reconnu comme l'un des plus grands théoriciens actuels du post-colonialisme, Il est intervenu dans de nombreuses universités et institutions américaines dont l'université Columbia de New York, la Brookings Institution de Washington, l'université de Pennsylvanie, l'université de Californie, Berkeley, l'université Yale mais aussi au Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (Codesria) à Dakar au Sénégal. Il est actuellement membre de l'équipe du Wits Institute for Social & Economic Research (WISER) de l'Université du Witwatersrand de Johannesburg en Afrique du Sud. Ses principaux centres d'intérêts sont l'histoire de l'Afrique, la politique africaine et les sciences sociales.Trajectoire d'une pensée dissidenteAchille Mbembe est né au centre du Cameroun en juillet 1957. Il appartient à l'ethnie bassa, l'une des plus importantes du Cameroun. Il a passé une bonne partie de son enfance à Malandè, petit village situé non loin d'Otélé, important carrefour sur la ligne du chemin de fer Douala-Yaoundé. Mbembe a été éduqué à l'internat par les pères dominicains. Il s'engagera dans la Jeunesse estudiantine chrétienne (JEC) où, très rapidement, il aura la responsabilité du journal du mouvement, Au Large.Sa région d'origine fut un bastion du mouvement nationaliste camerounais. Il se souvient particulièrement du récit de la mort de Ruben Um Nyobè, le fondateur de l'UPC, sauvé de l'oubli officiel par la mémoire populaire.Il est impliqué dans des grèves au collège, puis à l'université de Yaoundé qu'il fréquente à partir de 1978. Son mémoire de maitrise d'histoire porte sur les violences qui accompagnèrent le processus de décolonisation du Cameroun. Il ne fera jamais l'objet d'une défense publique, les autorités académiques de l'époque s'étant désistées.Grâce à son engagement dans la JEC, il entreprend la découverte du Nord-Cameroun et, de manière générale, la connaissance de son pays et plus particulièrement de la vie de ses paysans. Avec ses camarades, il participe à des cours d'alphabétisation, organisés l'été pour les paysans, dans le village de Mokong, non loin de Maroua, l'un des principaux centres commerciaux de la région.Dans un texte d'allure autobiographique consacré aux intellectuels africains paru dans la revue Politique africaine, il reviendra à plusieurs reprises sur l'idée que rien ne fut facile, rien ne fut promis, rien ne fut donné. Chaque étape dans son accomplissement d'homme et d'intellectuel représente une bataille. La question du travail pour financer les études est donc consubstantielle à son existence et à sa vie d'intellectuel.Formation d'un brillant esprit subversif au CamerounLe journal de la JEC constitua, pour le jeune Mbembe et ceux de sa génération, une excellente tribune pour analyser différents aspects de l'autoritarisme de l'époque, sous les dictatures d'Ahmadou Ahidjo (1958-1982) et de Paul Biya (de 1982 à nos jours).A travers un examen du divorce entre le système éducatif et la société, ils s'emploieront à exprimer leur rejet des aspects les plus absurdes de la postcolonie. Des cours d'alphabétisation des paysans organisés l'été par la JEC, Mbembe fera l'expérience d'une politisation accrue, s'affranchissant également des dogmatismes idéologiques.Son expérience au sein de la JEC lui permit également de voyager en Afrique. Ainsi, suite à son voyage en Tanzanie en 1980, il entrera en contact avec la pensée du « Mwalimu » Julius Nyerere. En effet, dans les années 1970-1980, Dar Es Salam est un centre de bouillonnement intellectuel et de lutte pour la libération du continent. Le Comité de l'Organisation de l'Unité Africaine y est basé. Julius Nyerere pourvoit argent et soutien logistique à tous les mouvements de libération sur le continent. Par ailleurs l'Université de Dar es Salaam est un grand lieu de la production intellectuelle du marxisme africain.Achille Mbembe cherchera à penser avec et contre Frantz Fanon, le célèbre écrivain anti-colonialiste, dans une perspective que l'on pourrait appeler une « éthique de l'interrogation ». Fanon écrivait justement « Mon corps fait de moi un être qui interroge ». Une des multiples problématiques qui traverse l'œuvre de Mbembe est celle de « se tenir débout par soi-même, après l'expérience de la colonisation ». Il se concentre sur la post-colonie qui fait suite à la colonisation. Mbembe n'interroge pas seulement le leadership africain, mais développe une réflexion historique et philosophique sur la question de l'autogouvernement, et s'attache à penser la possibilité de l'autoréalisation du sujet africain dans un monde de plus en plus complexe, globalisé et extrêmement technique. L'Afrique longtemps considérée comme en dehors du monde, retrouve dans son analyse un statut identique aux autres continents, ni supérieur, ni inférieur. L'Afrique est pensée dans son altérité au monde.Héritier de la rigueur des grands penseurs camerounais, tel Fabien Eboussi Boulaga et Jean Marc Ela, qui passe pour être son principal inspirateur, Mbembe perpétue une pensée engagée dans l'action.Le temps de la maturité à Paris et du désenchantementArrivé à Paris en 1982, Mbembe poursuit des études d'histoire à l'université de Paris-I (Panthéon-Sorbonne), tout en multipliant les écrits dans la presse de gauche (dont Le Monde diplomatique). Il commence une thèse de doctorat d'État, sous la direction de Catherine Coquery-Vidrovitch, historienne de l'Afrique, qui est la continuation de ses travaux sur le mouvement nationaliste camerounais. Il s'inscrit également à Sciences-Po où il travaille sous la direction de Jean Leca. Ayant grandi et vécu au Cameroun, Jean François Bayart devient son « mentor » parisien. Il lui ouvre les pages de sa revue Politique africaine et de son école de pensée (le politique par le bas en Afrique). Mbembe reconnaît lui-même qu'en plus de Jean-Marc Ela, Jean Leca et Jean François Bayart exercèrent une influence considérable dans l'invention de son soi intellectuel.Sa formation terminée, Mbembe obtient un poste de professeur assistant à l'université Columbia. Pendant sa période de formation à Paris, Mbembe réalisera la douloureuse désillusion de l'entrée du continent dans ce qu'il appellera alors le temps du malheur. Il fera donc partie de cette génération tourmentée entre la volonté de retourner sur le Continent pour contribuer aux changements nécessaires et une impossibilité pratique de se réaliser de manière satisfaisante en Occident.Aux États-Unis et au CODESRIAAchille Mbembe part aux États-Unis en 1986, bénéficiant d'une bourse de la fondation Ford, pour rédiger son livre Afriques indociles. Richard Joseph, aujourd'hui professeur d'études africaines à la Northwestern University à Chicago, facilita à l'époque son séjour. De son expérience américaine, il reconnaîtra ce qu'il appellera plus tard une éthique de l'accueil pour le chercheur qu'il est. Il fut également surpris de la très grande présence d'autres universitaires issus de ce que l'on appelle aujourd'hui les « minorités visibles ». Il enseigne aussi dans plusieurs universités, dont celle de Californie (Irvine) au sein de laquelle il intervient toujours actuellement. À Berkeley, à Los Angeles, Yale, Boston, Duke, Chicago, Philadelphie, il a parlé du continent, de sa multiplicité, de ses contradictions et de sa pluralité à des étudiants venus du monde entier. Il a été professeur invité dans plusieurs pays dans le monde.Lorsqu'après une année aux États-Unis il revient soutenir sa thèse à Paris, il a déjà acquis une aura internationale incontestable. Après trois ans d'enseignement à l'université Columbia, il passe une année à la Brookings Institution à Washington avant de rejoindre l'université de Pennsylvanie en 1992. En 1996, il obtient la bourse de la MacArthur Foundation.Après son expérience américaine, il obtient le poste de Secrétariat Exécutif du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (Codesria) à Dakar (juillet 1996-janvier 2000). Excédé par les luttes idéologiques qui affaiblissaient sa capacité d'action, il démissionne en janvier 2000.Mbembe s'établit ensuite au Cap en Afrique du Sud où il finit d'écrire De la postcolonie. Puis, après un congé sabbatique à Berkeley, l'université du Witwatersrand à Johannesburg demanda son concours en vue de l'établissement d'un nouvel Institut de recherche, le Witwatersrand Institute of Social and Economic Research, où il exerce depuis 2001 les fonctions de directeur de recherche.De l'épistémologie africaineTrès tôt, Mbembe prend conscience de la nécessité de penser ce qu'il appelle la longue nuit du monde africain postcolonial [citation nécessaire] et de produire collectivement un discours, un savoir et une épistémologie de l'Afrique et non simplement sur l'Afrique, construite par ses intellectuels.Mbembe prend vite part au débat sur la place du chercheur dans le processus de production du savoir sur l'Afrique. Pendant son mandat au CODESRIA, un vif débat agite les africanistes au sujet de la production du savoir en Afrique. Certains défendent la position selon laquelle seuls les Africains peuvent produire un savoir objectif sur le continent, alors que d'autres, dont Mbembe, soutiennent, à l'inverse, que tout être doué de raison peut produire un savoir sur n'importe quel sujet. Les premiers affirment qu'il serait impossible de saisir l'Afrique dans ses nuances et pour ce qu'elle est à l'aide de références occidentales, d'outils et de théories produites dans le contexte occidental.À l'instar de Jean-François Bayart, qui affirmait qu'il faut se détacher des références occidentalo-centrées, pour percevoir l'Afrique à partir de ce qu'elle représente elle-même dans ses réalités propres, Mbembe invite à voir, percevoir et sentir le continent non pas en termes d'absence ou de manque, mais analyser ce que représente le continent aujourd'hui. Il s'oppose ainsi à l'analyse de l'Afrique, notamment au sein des institutions internationales (ONU, PNUD, FMI, Banque mondiale, Union européenne, etc.), dans une perspective de manque, de déficit, d'injonction à ce que devrait être l'Afrique. Ainsi, celle-ci est toujours perçue en référence à l'Occident, à un modèle à atteindre, et non pour ce qu'elle est réellement. En dépit de cette abondante prose des experts sur l'Afrique, Mbembe nous rappelle que la seule chose que nous sachions de l'Afrique, c'est ce que devrait être le continent...Sans doute à cause de la sévérité de son regard sur l'Afrique, certain accusent Mbembe de faire le jeu d'un afro-pessimisme qu'il combat pourtant. L'incompréhension entre Mbembe et « ses frères » intellectuels est courante. On lui reproche notamment sa théorie de la nécro-politique, inspirée de l'œuvre foucaldienne, dans laquelle il définit la souveraineté comme le pouvoir de vie ou de mort dont disposent les dirigeants africains sur leur peuple. Beaucoup ont compris cette pensée comme si le politique en Afrique se résumait simplement au pouvoir de donner la mort. Mbembe décrit ainsi la postcolonie comme un lieu où le commandement et le pouvoir sont aussi une « économie de la mort ». Les gouvernants exercent leur autorité sur un mode de violence, d'obscénité et de grotesque. Les gouvernants s'arrogent ainsi le privilège sur la vie des gouvernés. C'est un temps où « être souverain c'est exercer son contrôle sur la mortalité et définir la vie comme le déploiement et la manifestation du pouvoir » [citation nécessaire]. Pour Mbembe l'on assiste en postcolonie à une violence improductive, contrairement au temps colonial ou la violence, selon lui, poursuivait un but : la rentabilité. Cette théorie est encore perçue sur le continent comme une hérésie.Comment se nommer soi-même lorsque les outils de réflexion et d'analyse sont une invention exogène. Édouard Glissant nous rappelle que se nommer soit même c'est exister. Or comment exister uniquement par la médiation de l'autre ? En d'autres termes, si Mbembe n'avait pas utilisé la théorie du biopouvoir pour décrire ce phénomène sur le continent, la réaction serait-elle la même ?Dieu, la postcolonie et l'épiscopat africain.« En premier lieu, elle [la postcolonie] met à nu aussi bien la violence inhérente à une idée particulière de la raison que le fossé qui, dans les conditions coloniales, sépare la pensée éthique européenne de ses décisions pratiques, politiques et symboliques. Comment, en effet, réconcilier la foi proclamée en l'homme et la légèreté avec laquelle on sacrifie la vie, le travail des colonisés et leur monde de significations ? C'est, à titre d'exemple, la question que pose Aimé Césaire dans son Discours sur le colonialisme. D'autre part, la pensée postcoloniale insiste sur l'humanité à venir, celle qui doit naître une fois que les figures coloniales de l'inhumain et de la différence raciale auront été abolies » . Tout en fustigeant la violence coloniale, il démontre que la les indépendances n'ont pu se départir de l'héritage empoisonné de l'État colonial.Les critiques adressées par Mbembe à l'égard du clergé africain, accusé d'avoir simplement pris la place des missionnaires blancs en préservant le système politico-social de l'Église catholique romaine, notamment dans la gestion foncière, et de soutenir les régimes autoritaires ou dictatoriaux. Bien que Mbembe partage une position fortement anti-cléricaliste, il reste attentif au discours théologique, notamment depuis sa découverte de la théologie de la libération de Gustavo Guttiérez, lecture qui a éveillé en lui une pratique subversive de la grammaire du sacré. Il s'interroge en outre sur les raisons expliquant le faible enracinement de la théologie de la libération en Afrique [citation nécessaire].
Achille Mbembe (2)
De la postcolonie, ouvrage majeur d'un théoricien en devenirThéoricien de la postcolonie, Mbembe rend l'étude de celle-ci célèbre dans le monde francophone avec son ouvrage éponyme, De la postcolonie. Essai sur l'imaginaire politique dans l'Afrique contemporaine (2000). Dans un entretien publié par Esprit, il précise toutefois que la post colonie n'est pas une théorie mais une critique qui se construit dans un mouvement dynamique de sédimentation encore en devenir.Achille Mbembe définit la postcolonie comme une notion qui renvoie « à l'identité propre d'une trajectoire historique donnée : elle est des sociétés récemment sorties de l'expérience que fut la colonisation, celle-ci devant être considérée comme une relation de violence par excellence. » [citation nécessaire] Cette notion a pris ancrage dans les départements de Subaltern studies, souvent dirigés par des universitaires issus d'anciennes colonies. L'expression « postcolonie » est aujourd'hui devenue une référence dans les études subalternes qui désignaient initialement des champs de compétences autres que le monde occidental et ses problématiques.Mbembe inscrit sa thématique dans une problématique qui tente d'offrir une certaine originalité dans l'examen du problème africain. Dans la seconde édition de 2004, il ajoute un avant-propos où il définit l'Afrique comme un lieu où le temps s'agite, le tumulte prive de la sérénité. Il critique ensuite trois genres de discours produits sur le continent: l'Afro-pessimisme, l'africanisme et l'afro-radicalisme. Le premier est accusé d'être un avatar de l'imaginaire raciste:« C'est un discours gouverné par la haine des noirs et le mépris du continent »; « nous autres qui vivons sur place perdrions notre temps à vouloir le réfuter tant il brille par sa sottise » [citation nécessaire]L'afro-radicalisme, quant à lui, naîtrait selon Mbembe d'une entaille originelle, de la rencontre entre l'Occident et l'Afrique, vécue comme un viol, ce qui empêcherait de penser et de formuler un discours épuré de la haine de l'autre, toujours perçu comme coupable des maux du continent. Mbembe met ainsi en garde la jeunesse africaine qui, malgré le fait qu'elle soit née après les indépendances, continuerait à penser que bon nombre des problèmes du continent sont du fait de l'autre, du Blanc.La violence du colon sur le colonisé s'inscrivait dans un assujettissement total quoique repoussé par l'indiscipline de l'assujetti cherchant son émancipation. Pour Mbembe cette colonisation précédée quelque temps avant par la traite négrière est loin d'être « une histoire de la pacification » moins encore celle de la « civilisation » du barbare, contrairement à ce que présente l'histoire officielle. Au nom de la productivité le colonisé pouvait subir les crimes les plus odieux de la part du « civilisateur ». La colonialité se déploie dans une idéologie déshumanisante qui dans bien des cas suscite la révolte du colonisé, suivie systématiquement par une répression sanglante.La postcolonie est aussi un monde où la sacralisation et la désacralisation se côtoient, où « l'obscénité » n'est pas l'affaire que de la plèbe. Dans ce monde, le sens est banalisé, c'est ainsi que vient se greffer au sens officiel imposé par le gouvernant un second sens, dédoublé du premier par les gouvernés et tournant le solennel du pouvoir en dérision. Les gouvernants dans leur sacralisation démesurée peuvent se mettre à solenniser et officialiser les faits les plus triviaux et à les imposer ainsi aux gouvernés.En postcolonie la sphère économique a su mettre à nu les lacunes des États en faillite. Les inégalités criantes qui s'observent servent de justification aux rébellions et coups d'État qui, une fois au pouvoir, sont, dans bien des cas, loin d'opérer un véritable changement. L'accroissement de la productivité est exigé de cette Afrique qui doit aussi faire face à l'accroissement des inégalités.Fervent lecteur de Frantz Fanon, Mbembe s'inscrit dans la logique de se tenir débout par soi-même: l'Afrique ne doit rien attendre de personne. Aucun pays au monde ne s'est développé avec l'aide au développement, ni encore moins avec une gestion humanitaire d'un problème politique. Mbembe rejette toute posture victimaire. A ceux qui disent que l'Afrique reçoit plus qu'elle ne donne, il démontre, chiffres à l'appui, qu'en dépit du marasme ambiant sur le continent, le retour sur investissement des entrepreneurs occidentaux est plus que rentable.Mbembe et la philosophie africaineSelon C. Coquery-Vidrovitch, Mbembe sollicite la philosophie occidentale pour rendre intelligible le continent. Comment comprendre la mise à l'écart des philosophes africains comme Y.V. Mudimbe, P. Hountondji ? Serait-il lui-même victime de l' « occidentalo-centrisme » des sciences sociales ou bien la philosophie africaine n'a-t-elle rien à dire face à la crise contemporaine du Continent ?Âge du fratricide et paix armée: deux périodes post-guerre froideMbembe désigne par le terme d'« âge du fratricide » [citation nécessaire] la période succédant, en Afrique, à la fin de la guerre froide, et qui coïncide avec une multitude de conflits dits de « basse intensité ». Il parle alors de « pulsion de mort » et de « passion de détruire » [citation nécessaire], et qualifie cette période comme le moment où « la violence du frère à l'égard du frère devient la règle, autrement dit le frère et l'ennemi ne font plus qu'un » [citation nécessaire]. Pour qualifier ces combats, il parle de guerre postcoloniale, artisanale mais néanmoins extrêmement dévastatrice, à l'instar du génocide au Rwanda.Selon Mbembe, qui ré-investit le vocabulaire psychanalyste, les idéaux du panafricanisme et de solidarité n'auraient pas survécu, après le meurtre du Père colonisateur, aux ambitions de quelques responsables politiques qui ont manipulé avec agilité les questions identitaires, autour de l'autochtonie.Mbembe introduit aussi la question du genre, notion issue des Gender studies anglo-saxonnes, pour faire intervenir dans l'analyse de ces conflits la problématique de la sœur et de la mère, et comprendre l'usage du viol en tant qu'arme de guerre.Enfin, il appelle la période actuelle celle de la « paix armée ». A la cartographie conflictuelle des décennies 1990-2000 succède une sortie de crise faite de retour en arrière, et de crises ponctuelles mais ne semblant pas mettre en cause la dynamique global de pacification.La problématique de la réconciliation, du retour des déplacés intérieurs, des réfugiés, reste au cœur de toute politique de reconstruction après la guerre. Or peut–on réconcilier sans justice ? Peut-on pacifier sans indemniser les victimes de la guerre ? Partout sur le continent le modèle sud-africain du Tribunal « Justice et Réconciliation » semble faire école, nonobstant sa singularité, qui pose le problème de son application à d'autres pays.De la démocratie en AfriqueMbembe distingue trois éléments obstruant la démocratisation en Afrique 1. D'abord la faillite de l'État et l'informalisation des économies. Il ajoute le double impératif d'une ouverture politique et économique et la diffraction sociale. Enfin il rappelle que l'atrophie des intellectuels africains, restés muets et sourds sur la nécessité de réfléchir sur un modèle de démocratie sur le continent peut être un facteur explicatif de la difficulté de ce régime politique à s'enraciner sur le continent.Mbembe dépasse ainsi le débat entre les dynamiques du dehors et du dedans dans les transformations en cours sur le continent. Sa mission consiste à éclairer, à donner à comprendre et si possible à formuler des théories pouvant faciliter l'identification des facteurs de résistances et des obstacles au projet de l'indépendance : se tenir debout par soi-même en Afrique.L'enjeu n'est pas de copier un quelconque système de gouvernement, mais plutôt de voir dans quelle mesure une gouvernance démocratique peut advenir sur le continent, à partir de réalité ancrée localement et qui font sens pour les communautés politiques africaines.Un intellectuel public au cœur de son tempsMbembe intervient régulièrement sur le blog d'Alain Mabanckou pour tenir des chroniques sur les enjeux majeurs du contient. Tous les sujets y passent, du football aux homosexuels, en passant par la famille moderne africaine. Il donne des entretiens à la radio, à la presse écrite et dans de nombreux médias en dehors du cercle académique.Son article sur les équipes africaines au mondial 2006 a été complété par des entretiens avec son ami Lilian Thuram sur d'autres sujets portant plutôt sur la citoyenneté en France. Avec Célestin Monga, ils ont interrogé l'Afrique contemporaine et les enjeux autour de la famille et de la responsabilité des élites…Publications• Présentation plus détaillée sur le site du WISER-institute : http://wiserweb.wits.ac.za/home%20-%20staff.htm#2• 2010 Sortir de la grande nuit : Essai sur l'Afrique décolonisée, Paris: Editions La Découverte• 2000 De la postcolonie. Essai sur l'imagination politique dans l'Afrique contemporaine. Paris: Karthala, 280 pp. (traduit en anglais: On the Postcolony. Berkeley: University of California Press, 274 pp., 2001)• 2000 On Private Indirect Government. Dakar: CODESRIA, 117 pp.• 1996 La naissance du maquis dans le Sud-Cameroun (1920-1960) Histoire des usages de la raison en colonie. Paris: Karthala, 438 pp.• 1991 (avec J.F. Bayart, C. Toulabor), Le politique par le bas: Contribution à une problématique de la démocratie en Afrique noire. Paris: Karthala, pp. 148-256.• 1988 Afriques indociles. Christianisme, pouvoir et État en société postcoloniale. Paris: Karthala, 222 pp.• 1986 Les jeunes et l'ordre politique en Afrique noire. Paris: L'Harmattan, 247 pp., ISBN 978-8025425220Collaboration à d'autres ouvrages• 2008 L'Afrique de Sarkozy : un déni d'histoire (avec Jean-François Bayart, Pierre Boilley, Ibrahima Thioub sous la dir. de Jean-Pierre Chrétien) éd. Karthala, 2008• 2005 La République et l'impensé de la « race ». In La fracture coloniale. La société française au prisme de l'héritage colonial. (edited by Pascal Blanchard, Nicolas Bancel and Sandrine Lemaire). Paris : La Découverte. 139-153.)• 2005 À la lisière du monde. Frontières, territorialité et souveraineté en Afrique. In Le territoire est mort. Vive les territoires! (edited by Benoit Antheaume et Frédéric Giraut). Paris: IRD Editions. 47-78.• 2004 Subject and Experience. In Keywords/Experience. For a Different Kind of Globalization (edited by Nadia Tazi). Johannesburg: Double Storey Books. 1-18.• 2004 Logiques de transformation sociale et recomposition des espaces de pouvoir en Afrique de l'Ouest. In L'Afrique de l'Ouest dans la compétition mondiale. Quels atouts possibles ? (edited by Jacqueline Damon and John O. Igue). Paris: Karthala. 197-218.• 2003 Provisional Notes on the Postcolony. In Contemporary African Art and Shifting Landscapes (edited by Gilane Tawadros and Sarah Campbell). London: Institute of International Visual Art.53-64.• 2003 Sovereignty as a Form of Expenditure. In Sovereign Bodies. Citizens, Migrants, and States in the Postcolonial World. (edited by Thomas Blom Hansen and Finn Stepputat). Princeton: Princeton University Press. 148-1676.• 2002 (avec J. Roitman), Figures of the Subject in Times of Crisis. In Under Siege: Four African Cities (edited by Okwui Enwezor and al.). Ostfildern-Ruit: Hatje Cantz Publishers. 99-128.• 2002 The Power of the Archive and its Limits. In Refiguring the Archive, edited by Carolyn Hamilton. Le Cap, David Philip. 19-26.• 2001 At the Edge of the World: Boundaries, Territoriality, and Sovereignty in Africa. In Beyond State Crisis? Postcolonial Africa and Post-Soviet Eurasia in Comparative Perspective, edited by Mark R. Beissinger and Crawford Young. Washington, D.C.: Woodrow Wilson Center Press. 53-80.• 2001 The Subject of the World. In Facing Up to the Past: Perspectives on the Commemoration of Slavery from Africa, the Americas and Europe, edited by Gert Oostindie. Ian Randle Publishers. 21-28.• 1996 The ‘Thing' and Its Double in Cameroonian Cartoons. In Readings in African Popular Culture, edited by K. Barber. London : James Currey.151-163.• 1997 L'état-civil de l'État en Afrique. In GEMDEV : Les avatars de l'État en Afrique. Paris : Karthala.• 1994 Déflation de l'État, civilité et citoyenneté en Afrique noire. In GEMDEV, L'intégration régionale dans le monde. Innovations et ruptures. Paris, Karthala, pp. 273-286.• 1993 Prolifération du divin et régimes du merveilleux en postcolonie. In Les politiques de Dieu, edited by G. Kepel, Paris: Le Seuil, pp. 177-201.• 1993 Crise de légitimité, restauration autoritaire et déliquescence de l'État au Cameroun. In Itinéraires d'accumulation au Cameroun, edited by P. Geschiere & P. Konings, Paris: Karthala, pp. 345-373.• 1989 Bureaucratie et forces marchandes dans le Cameroun de l'entre-deux-guerres, 1920-1938. In The Political Economy of Cameroon Historical Perspectives, edited by P. Geschiere & P. Konings. Leiden: ASC Research Report, pp. 785-809.Source : Wikipédia
ADAMOU NDAM NJOYA
Adamou Ndam Njoya (né le 8 mai 1942 à Foumban, Cameroun)est un universitaire, un écrivain et un homme politique camerounais.Il est le président de l'Union démocratique du Cameroun (UDC).ÉducationNdam Njoya est marié et père de cinq enfants. Son éducation primaire se fit à Foumban et Nkongsamba, puis il étudia au lycée Général Leclerc à Yaoundé. Après les études primaires et secondaires au Came-roun, il a poursuivi les études supérieures en France, qui furent couronnées par l'obtention du doctorat de 3e Cycle et du doctorat d'État en droit public interna¬tional et en sciences politiques.Étudiant à l'Institut international d'administration publique (IIAP), il suivit tour à tour des stages au ministère des Affaires étrangères, à l'ambassade de France à Londres et aux organisations internationales à l'Office de l'Europe à Genève, avant de retourner au Cameroun en 1969.Services gouvernementauxNdam Njoya fut brièvement membre du ministère des Affaires étrangères (1960-1970), avant de rejoindre la faculté de droit à l'Université de Yaoundé, poste qu'il occupe toujours actuellement.Ndam Njoya a également travaillé pour la Fondation Carnegie pour la Paix Internationale au Cameroun en tant que directeur du programme de formation diplomatique. Dans le même temps, il collabora à la création et devint le premier directeur, de 1972 à 1975, de l'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC). En 1975, il fut nommé vice-ministre des Affaires étrangères.En 1977, Ndam Njoya fut nommé au minsitère de l'Éducation nationale. Son projet d'introduire sévérité et moralité dans le système éducatif rencontra une forte résistance, notamment de la part des riches familles francophones, dont les enfants réussissaient dans le primaire et le secondaire grâce à l'argent, et qui faisaient quelques dons aux écoles.Face à de telles pressions, le président Ahmadou Ahidjo renvoya Ndam Njoya de son poste, en 1980, et le fit ministre délégué à la présidence chargé de l'inspection générale de l'État et des réformes administratives, un poste relativement ingrat.En janvier 1982, Ahidjo le renvoie du gouvernement.ÉcrivainDe 1982 à 1990, Ndam Njoya consacre aussi bien son temps à l'écriture et à l'enseignement qu'à des efforts philantropiques (membre du bureau exécutif de l'UNESCO de 1985 à 1989). Il écrit tant à propos de la loi, des sciences politique, de l'histoire, des relations internationales et des idées politiques que des pièces de théâtre, des poèmes et des fictions.Parmi les œuvres sélectionnées :1975 : Prières et chants de louanges à Dieu Ndam et Raynier, Yaoundé, Cameroun ;1976 : Le Cameroun dans les relations internationales, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, (ISBN 978-2-275-01397-8) ;1977 : Njoya : réformateur du royaume Bamoun N.E.A. (Nouvelles éditions africaines), Abidjan, Côte d'Ivoire, (ISBN 978-2-85809-101-0) ;1982 : Les Amo : recueil de poèmes Ndam et Raynier, Yaoundé ;1983 : Manuel pratique de rédaction administrative et des documents diplomatiques, éditions SOPECAM, Yaoundé, CamerounPolitiqueEn décembre 1990, le président Paul Biya permet le retour de partis politiques d'opposition au Cameroun et Ndam Njoya commence le rassemblement de politiciens potentiellement réformistes. Ndam Njoya est brièvement arrêté avec d'autres opposants politiques, mais ils seront rapidement relaxés.En septembre 1991, il annonce la formation du l'Union Démocratique du Cameroun. Dans la déclaration de son parti, Ndam Njoya a insisté sur la décentralisation du gouvernement et le respect des droits des minorités.Pendant les élections présidentielles de 2004, tous les partis de l'opposition acceptèrent de supporter un seul candidat contre Biya. Après que Ndam Njoya fût choisi par le consensus de la coalition, John Fru Ndi tira le front Social Démocratique en dehors de la coalition, qui dut faire cavalier seul. Les résultats: Ndam Njoya en tant que représentant de la coalition reçut 4,5% des voix, John Fru Ndi 17,4% et le président Biya 70,9%. Comme c'est devenu une habitude dans les élections camerounaises, la fraude massive a été alléguée.Depuis 2004, Ndam Njoya a remanié le char de l'Union Démocratique du Cameroun, parlant désormais de lutte contre la corruption, et toujours de travail pour la décentralisation.ActualitéAdamou Ndam Njoya est actuellement :• coprésident de la WCRP (Conférence Mondiale des Religions pour la Paix)/International et Président du Chapitre Camerounais ;• fondateur et président de l'Institut des études islamiques et religieuses (IRSI) et de l'École africaine d'Éthique (EAE) ;• président de l'Union Démocratique du Cameroun (UDC) ;• Maire de Foumban ;• membre du Conseil d'Administration du Réseau parlementaire sur la Banque mondiale ;• fondateur et directeur de publication des revues culturelles: A1 Houda, Communauté, Le Terroir.Décorations• Belgique: Grande Croix de l'Ordre de Léopold ;• Cameroun: Chevalier de l'Ordre de !a valeur ; Officier de l'Ordre de la valeur ;• Côte d'ivoire: Officier de l'Ordre ivoirien ;• France: Commandeur de la Légion d'Honneur; Commandeur des Palmes académiques.Source : Wikipédia
AIME CESAIREAimé Fernand David Césaire,est un poète et homme politique martiniquais,né le 26 juin 1913 à Basse-Pointe et mort le 17 avril 2008 à Fort-de-France.Il est l'un des fondateurs du mouvement littéraire de la négritude et un anticolonialiste résolu.BiographieAimé Césaire faisait partie d'une famille de sept enfants ; son père était instituteur et sa mère couturière. Son grand-père fut le premier enseignant noir en Martinique et sa grand-mère, contrairement à beaucoup de femmes de sa génération, savait lire et écrire ; elle enseigna très tôt à ses petits-enfants la lecture et l'écriture2. De 1919 à 1924, Aimé Césaire fréquente l'école primaire de Basse-Pointe, commune dont son père est contrôleur des contributions, puis obtient une bourse pour le lycée Victor Schoelcher à Fort-de-France. En septembre 1931, il arrive à Paris en tant que boursier pour entrer en classe d'hypokhâgne au lycée Louis-le-Grand où, dès le premier jour, il rencontre Léopold Sédar Senghor, avec qui il noue une amitié qui durera jusqu'à la mort de ce dernier.Émergence du concept de négritudeAu contact des jeunes africains étudiant à Paris, notamment lors des rencontres au salon littéraire de Paulette Nardal, Aimé Césaire et son ami guyanais Léon Gontran Damas, qu'il connaît depuis la Martinique, découvrent progressivement une part refoulée de leur identité, la composante africaine, victime de l'aliénation culturelle caractérisant les sociétés coloniales de Martinique et de Guyane.En septembre 1934, Césaire fonde, avec d'autres étudiants antillo-guyanais et africains (parmi lesquels Léon Gontran Damas, le Guadeloupéen Guy Tirolien, les Sénégalais Léopold Sédar Senghor et Birago Diop), le journal L'Étudiant noir. C'est dans les pages de cette revue qu'apparaîtra pour la première fois le terme de « Négritude ». Ce concept, forgé par Aimé Césaire en réaction à l'oppression culturelle du système colonial français, vise à rejeter d'une part le projet français d'assimilation culturelle et à promouvoir l'Afrique et sa culture, dévalorisées par le racisme issu de l'idéologie colonialiste.Construit contre l'idéologie coloniale française de l'époque, le projet de la Négritude est plus culturel que politique. Il s'agit, au-delà d'une vision partisane et raciale du monde, d'un humanisme actif et concret, à destination de tous les opprimés de la planète. Césaire déclare en effet : « Je suis de la race de ceux qu'on opprime ».Ayant réussi en 1935 le concours d'entrée à l'École normale supérieure, Césaire passe l'été en Dalmatie chez son ami Petar Guberina et commence à y écrire le Cahier d'un retour au pays natal, qu'il achèvera en 1938. Il lit en 1936 la traduction de l'Histoire de la civilisation africaine de Frobenius. Il prépare sa sortie en 1938 de l'École normale supérieure avec un mémoire : Le Thème du Sud dans la littérature noire-américaine des USA. Épousant en 1937 une étudiante martiniquaise, Suzanne Roussi, Aimé Césaire, agrégé de lettres, rentre en Martinique en 1939, pour enseigner, tout comme son épouse, au lycée Schœlcher.Le combat culturel sous le régime de VichyLa situation martiniquaise à la fin des années 1930 est celle d'un pays en proie à une aliénation culturelle profonde, les élites privilégiant avant tout les références arrivant de la France, métropole coloniale. En matière de littérature, les rares ouvrages martiniquais de l'époque vont jusqu'à revêtir un exotisme de bon aloi, pastichant le regard extérieur manifeste dans les quelques livres français mentionnant la Martinique. Ce doudouisme, dont des auteurs tels que Mayotte Capécia sont les tenants, allait nettement alimenter les clichés frappant la population martiniquaise.C'est en réaction à cette situation que le couple Césaire, épaulé par d'autres intellectuels martiniquais comme René Ménil, Georges Gratiant et Aristide Maugée, fonde en 1941 la revue Tropiques. Alors que la Seconde Guerre mondiale provoque le blocus de la Martinique par les États-Unis (qui ne font pas confiance au régime de collaboration de Vichy), les conditions de vie sur place se dégradent. Le régime instauré par l'Amiral Robert, envoyé spécial du gouvernement de Vichy, est répressif. Dans ce contexte, la censure vise directement la revue Tropiques, qui paraîtra, avec difficulté, jusqu'en 1943.Le conflit mondial marque également le passage en Martinique du poète surréaliste André Breton (qui relate ses péripéties dans un bref ouvrage, Martinique, charmeuse de serpents). Breton découvre la poésie de Césaire à travers le Cahier d'un retour au pays natal et le rencontre en 1941. En 1943 il rédige la préface de l'édition bilingue du Cahier d'un retour au pays natal, publiée dans la revue Fontaine (n° 35) dirigée par Max-Pol Fouchet et en 1944 celle du recueil Les Armes miraculeuses, qui marque le ralliement de Césaire au surréalisme.Surnommé « le nègre fondamental », il influencera des auteurs tels que Frantz Fanon, Édouard Glissant (qui ont été élèves de Césaire au lycée Schoelcher), le guadeloupéen Daniel Maximin et bien d'autres. Sa pensée et sa poésie ont également nettement marqué les intellectuels africains et noirs américains en lutte contre la colonisation et l'acculturation.Après guerre, le combat politiqueEn 1945, Aimé Césaire, coopté par les élites communistes qui voient en lui le symbole d'un renouveau, est élu maire de Fort-de-France. Dans la foulée, il est également élu député, mandat qu'il conservera sans interruption jusqu'en 1993. Son mandat, compte tenu de la situation économique et sociale d'une Martinique exsangue après des années de blocus et l'effondrement de l'industrie sucrière, est d'obtenir la départementalisation de la Martinique en 1946.Il s'agit là d'une revendication qui remonte aux dernières années du XIXe siècle et qui avait pris corps en 1935, année du tricentenaire du rattachement de la Martinique à la France par Belain d'Esnambuc. Peu comprise par de nombreux mouvements de gauche en Martinique déjà proches de l'indépendantisme, à contre-courant des mouvements de libération survenant déjà en Indochine, en Inde ou au Maghreb, cette mesure vise, selon Césaire, à lutter contre l'emprise béké sur la politique martiniquaise, son clientélisme, sa corruption et le conservatisme structurel qui s'y attache. C'est, selon Césaire, par mesure d'assainissement, de modernisation, et pour permettre le développement économique et social de la Martinique, que le jeune député prend cette décision.En 1947 Césaire crée avec Alioune Diop la revue Présence africaine. En 1948 paraît l'Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache, préfacée par Jean-Paul Sartre, qui consacre le mouvement de la « négritude ».En 1950, il publie le Discours sur le colonialisme, où il met en exergue l'étroite parenté qui existe selon lui entre nazisme et colonialisme. Il y écrit entre autres choses :« Oui, il vaudrait la peine d'étudier, cliniquement, dans le détail, les démarches d'Hitler et de l'hitlérisme et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXe siècle qu'il porte en lui un Hitler qui s'ignore, qu'Hitler l'habite, qu'Hitler est son démon, que s'il le vitupère, c'est par manque de logique, et qu'au fond, ce qu'il ne pardonne pas à Hitler, ce n'est pas le crime en soi, le crime contre l'homme, ce n'est pas l'humiliation de l'homme en soi, c'est le crime contre l'homme blanc, c'est l'humiliation contre l'homme blanc, et d'avoir appliqué à l'Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu'ici que les arabes d'Algérie, les colonies de l'Inde et les nègres d'Afrique [...] »S'opposant au Parti communiste français sur la question de la déstalinisation3, Aimé Césaire quitte le PC en 1956, s'inscrit au Parti du regroupement africain et des fédéralistes, puis fonde deux ans plus tard le Parti progressiste martiniquais (PPM), au sein duquel il va revendiquer l'autonomie de la Martinique. Il siège à l'Assemblée nationale comme non inscrit de 1958 à 1978, puis comme apparenté socialiste de 1978 à 1993.En 1966, Césaire est le vice-président du Festival mondial des Arts nègres à Dakar.Aimé Césaire restera maire de Fort-de-France jusqu'en 2001. Le développement de la préfecture de la Martinique depuis la Seconde Guerre mondiale est caractérisé par un exode rural massif, provoqué par le déclin de l'industrie sucrière et l'explosion démographique créée par l'amélioration des conditions sanitaires de la population.L'émergence de quartiers populaires constituant une base électorale stable pour le PPM, et la création d'emplois pléthoriques à la mairie de Fort-de-France furent les solutions trouvées pour parer à court terme aux urgences sociales de l'époque.La politique culturelle d'Aimé Césaire est incarnée par sa volonté de mettre la culture à la portée du peuple et de valoriser les artistes du terroir. Elle est marquée par la mise en place des premiers festivals annuels de Fort-de-France en 1972, avec la collaboration de Jean-Marie Serreau et Yvan Labéjof, puis la mise en place d'une structure culturelle permanente grâce à l'installation au Parc Floral de Fort-de-France et dans les quartiers, pour la première fois en Martinique d'une équipe professionnelle autour de Yves Marie Séraline missionné pour cette tâche, à partir de août 1974.En 1976, à partir des fondations de l'équipe de l'office de la culture provisoire, ce sera la création officielle du Service Municipal d'Action Culturelle (SERMAC) dirigé par Jean-Paul Césaire, qui par le biais d'ateliers d'arts populaires (danse, artisanat, musique) et du prestigieux Festival de Fort-de-France, met en avant des parts jusqu'alors méprisées de la culture martiniquaise.Le Sermac est dirigé depuis quelques années par Lydie Bétis. Cette même année, il reçoit à Léopold Sédar Senghor son ami et président du Sénégal à Fort-de-France.Son Discours du colonialisme fut pour la première fois au programme du baccalauréat littéraire (épreuve de lettres en Terminale) en 1995, avec le Cahier d'un retour au pays natal.Aimé Césaire s'est retiré de la vie politique (et notamment de la mairie de Fort-de-France en 2001, au profit de Serge Letchimy), mais reste un personnage incontournable de l'histoire martiniquaise jusqu'à sa mort. Après le décès de son camarade Senghor, il est resté l'un des derniers fondateurs de la pensée négritudiste.Jusqu'à sa mort, Aimé Césaire a toujours été sollicité et influent. On notera sa réaction à la loi française du 23 février 2005 sur les aspects positifs de la colonisation qu'il faudrait évoquer dans les programmes scolaires, loi dont il dénonce la lettre et l'esprit et qui l'amène à refuser de recevoir Nicolas Sarkozy. En mars 2006, Aimé Césaire revient sur sa décision, à la suite de la médiation de Patrick Karam[réf. nécessaire], et reçoit Nicolas Sarkozy puisque l'un des articles les plus controversés de la loi du 23 février 2005 a été abrogé. Il commente ainsi sa rencontre : « C'est un homme nouveau. On sent en lui une force, une volonté, des idées. C'est sur cette base-là que nous le jugerons4. »À la suite de cette rencontre Patrick Karam obtiendra du ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy qu'il agisse pour donner le nom Aimé Césaire à l'aéroport de Martinique[réf. nécessaire].Durant la campagne de l'élection présidentielle française de 2007, il soutient activement Ségolène Royal, en l'accompagnant lors du dernier rassemblement de sa vie publique. « Vous nous apportez la confiance et permettez-moi de vous dire aussi l'espérance5 ».Rétrospectivement, le cheminement politique d'Aimé Césaire apparaît étrangement contourné, en contraste avec la pensée de la négritude qu'il a développée par ailleurs. Tour à tour assimilationniste (départementaliste), indépendantiste et autonomiste (sans que l'on sache précisément ce qu'il entendait par là), Césaire semble avoir été davantage à la remorque des initiatives prises par les gouvernements métropolitains (en matière de décentralisation tout particulièrement) qu'un élément moteur de l'émancipation de son peuple. Il restera sans doute dans les mémoires comme le "nègre fondamental" et comme l'un des grands poètes de langue française du XXe siècle, mais non comme un chef politique ayant véritablement influencé son époque6.DécèsLe 9 avril 2008, il est hospitalisé au CHU Pierre Zobda Quitman de Fort-de-France pour des problèmes cardiaques. Son état de santé s'y aggrave et il décède le 17 avril 2008 au matin1.HommagesGraffiti en hommage à Aimé Césaire, à RoyanDès l'annonce de sa mort, de nombreuses personnalités politiques et littéraires lui ont rendu hommage comme le président Nicolas Sarkozy, l'ancien président sénégalais Abdou Diouf ou l'écrivain René Depestre.Ségolène Royal, Jean-Christophe Lagarde, Christine Albanel, appuyés par d'autres élus, ont demandé son entrée au Panthéon et une pétition a été mise en ligne pour qu'il soit inhumé au Panthéon le 10 mai 20087.Des obsèques nationales8 ont été célébrées le 20 avril 2008 à Fort-de-France, en présence du chef de l'État. Un grand discours a été prononcé par Pierre Aliker, son ancien premier adjoint à la mairie de Fort-de-France, âgé de 101 ans. Le président de la République n'a pas donné de discours mais s'est incliné devant la dépouille, devant plusieurs milliers de personnes réunies au stade de Dillon9. Il est inhumé au cimetière La Joyaux près de Fort-de-France. Sur sa tombe sont inscrits des mots choisis par Aimé Césaire lui-même et extraits de son Calendrier lagunaire :« La pression atmosphérique ou plutôt l'historique Agrandit démesurément mes maux Même si elle rend somptueux certains de mes mots10 »D'autres personnalités se sont déplacées, telles Dominique de Villepin, Laurent Fabius, Pierre Mauroy, Lionel Jospin, Yves Jégo, Rama Yade, Bernard Kouchner, François Hollande, François Fillon, Lucette Michaux-Chevry, Victorin Lurel, Michèle Alliot-Marie, Patrick Devedjian, Serge Letchimy…Plusieurs nouveaux édifices ont pris son nom depuis son décès. La station Pont de Stains (métro de Paris) de la ligne 12 du métro de Paris devrait prendre son nom11.Le parvis de la médiathèque de Limoges a pris le nom de Place Aimé Césaire en 2008.Dans H (série télévisée), le personnage d'Eric Judor se nomme Aymé Cesaire.Une plaque en son honneur a été dévoilée au Panthéon le 6 avril 2011.Son parcours politique• 1945-2001 Maire de Fort de France• 1983-1986 Président du Conseil régional de la Martinique• 1945-1993 député de la Martinique (durant 48 ans)• 1945 à 1949 et 1955 à 1970 : conseiller général de Fort-de-FranceŒuvresPoésie• 1939 Cahier d'un retour au pays natal, Revue Volontés n°20, 1939, Pierre Bordas 1947, Présence africaine, Paris, 1956.• 1946 Les Armes miraculeuses, 1946, Gallimard, Paris, 1970• 1947 Soleil cou coupé, 1947, Éditions K., Paris, 1948• 1950 Corps perdu (gravures de Picasso), Éditions Fragrance, Paris, 1950• 1960 Ferrements, Seuil, Paris, 1960, 1991• 1961 Cadastre, Seuil, Paris, 1961• 1976 Œuvres complètes (trois volumes), Desormeaux, Fort-de-France, 1976• 1982 Moi, laminaire, Seuil, Paris, 1982• 1994 La Poésie, Seuil, Paris, 1994. (Ce volume, qui compile toute l'œuvre poétique de l'auteur, figure au programme de l'agrégation de lettres modernes de 2009 à 2011, au sein du thème de littérature comparée intitulé "Permanence de la poésie épique au XXe siècle").• 2010 Sept poèmes reniés suivi de La Voix de la Martinique, édition bibliophilique (David Alliot éditeur), Paris, 2010• Théâtre 1958 Et les chiens se taisaient, Présence Africaine, Paris, 1958, 1997• 1963 La Tragédie du roi Christophe, Présence Africaine, Paris, 1963, 1993• 1966 Une saison au Congo, Seuil, Paris, 1966, 2001• 1969 Une Tempête, d'après La Tempête de William Shakespeare : adaptation pour un théâtre nègre, Seuil, Paris, 1969, 1997Essais 1948 Esclavage et colonisation, Presses Universitaires de France, Paris, 1948, réédition : Victor Schoelcher et l'abolition de l'esclavage, Éditions Le Capucin, Lectoure, 2004• 1950 Discours sur le colonialisme, éditions Réclames, Paris, 1950 ; éditions Présence africaine, 1955• 1987 Discours sur la négritude, 1987, Paris, Présence Africaine, 2004 (avec le Discours sur le colonialisme).• Lettre à Maurice Thorez• 1956 Présence Africaine, 16 pages, (avant-propos de Alioune Diop).• Histoire 1962 Toussaint Louverture, La révolution Française et le problème colonial, Présence Africaine, Paris• Entretiens 2004 Rencontre avec un nègre fondamental, Entretiens avec Patrice Louis, Arléa, Paris• 2005 Nègre je suis, nègre je resterai, Entretiens avec Françoise Vergès, Albin Michel, Paris• Enregistrement audio 1994 Aimé Césaire, Hatier, Paris, Les Voix de l'écriture
ALIOUNE DIOPAlioune Diop( 10 janvier 1910, Saint-Louis du Sénégal - 2 mai 1980, Paris)est un intellectuel sénégalais qui a joué un rôle de premier plan dans l'émancipation des cultures africaines, fondant notamment la revue Présence africaine.FormationFils de postier, Alioune Diop est né à Saint-Louis le 10 janvier 1910. Né musulman, il fréquente l'école coranique durant son enfance, mais ses tantes maternelles l'initient à la lecture de la Bible. A l'âge adulte, Alioune Diop se convertira au christianisme1. Il recevra son baptême catholique du père dominicain Jean-Augustin Maydieu dans la nuit de Noël 1944 à Saint-Flour dans le Cantal (France) sous le nom de Jean2.Le jeune Alioune effectue ses études primaires à Dagana et ses études secondaires à Saint-Louis (lycée Faidherbe). Il obtient son baccalauréat classique (Latin - Grec) en 1931. Puis, en qualité de citoyen français, il effectue son service militaire à Thiès.En 1933, n'ayant pas obtenu une bourse pour se rendre en métropole, il se rend à Alger où il s'inscrira à la faculté de Lettres classiques, à l'Université d'Alger, la même année qu'Albert Camus, alors en philosophie. Il subvient à ses besoins en exerçant les fonctions de Maître d'internat jusqu'à son arrivée en France en 1937. Il poursuivra ses études en faculté à Paris. Il est titulaire d'une licence de lettres classiques et d'un diplôme d'études supérieures3.En 1939, avec l'éclatement de la deuxième Guerre mondiale, il est mobilisé comme soldat, avant d'être démobilisé à l'armistice en 1940, qui le trouve à Marseille.CarrièreIl fera l'expérience de plusieurs activités professionnelles, tour à tour enseignant et fonctionnaire de l'AOF (professeur au Prytanée militaire de La Flèche dans la Sarthe en 1943, professeur au lycée Louis le Grand en 1945, puis chargé de cours à l'École coloniale, il est ensuite nommé chef du cabinet du Gouverneur général de l'Afrique occidentale française).Il sera également sénateur de la IVe République française4 entre décembre 1946 et novembre 1948. Il milite à cette époque à la SFIO (Section Française de l'Internationale Socialiste), et figure en troisième position sur la liste présentée par ce parti au Sénégal lors des élections du 23 décembre 1946 au Conseil de la République. Il est élu.Au terme de ce mandat, lors des élections qui suivent, le 14 novembre 1948, il figure encore en troisième position sur la liste présentée par la SFIO au Sénégal mais il n'est pas réélu, son siège étant remporté par Mamadou Dia du BDS (Bloc Démocratique Sénégalais).Cependant, c'est surtout à travers ses talents d'animateur culturel, d'organisateur, de fédérateur qu'il trouve sa voie, se consacrant désormais à ses activités d'éditeur de revue littéraire, puis d'éditeur au sein de sa maison d'édition.
CALIXTE BEYALACalixthe BeyalaNée en 1961 à Douala au Cameroun, est une romancière camerounaise.BiographieCalixthe Beyala est originaire d'une famille modeste du Cameroun, où elle passe son enfance1,2. Sa sœur aînée l'élève et subvient à sa scolarité. À l'âge de dix-sept ans, elle rejoint la France où elle se marie, obtient un baccalauréat, puis poursuit des études de gestion et de lettres1. Elle est mère de deux enfants.CarrièreCalixthe Beyala publie son premier ouvrage à l'âge de vingt-trois ans : C'est le soleil qui m'a brûlée, publié en 1987. Prolifique, son œuvre est récompensée par plusieurs distinctions : le Grand prix littéraire d'Afrique noire pour Maman a un amant, le Grand Prix du roman de l'Académie française pour Les Honneurs perdus, publié en 1996, et le Grand Prix de l'Unicef pour La Petite fille du réverbère. Elle est aussi chevalier des arts et des lettres1,3.En 1995, Le Canard enchaîné relève des emprunts au roman Fantasia chez les ploucs de Charles Williams. Par la suite, Pierre Assouline, de la revue Lire, identifie des emprunts pour une trentaine de passages auprès de quatre auteurs différents4. En se fondant sur ce travail de comparaison effectué par Pierre Assouline, le site web du magazine Télérama de juillet 2008 qualifie Calixthe Beyala de « récidiviste de la kleptomanie littéraire »5. Selon le Monde, Calixthe Beyala se défend en novembre 1996 des accusations de Pierre Assouline, en se déclarant victime de « persécution[s] » et de la « haine raciale » des « journalistes de gauche6 ».Elle accuse aussi Ben Okri d'avoir plagié son premier roman, après que le traducteur allemand de celui-ci eut signalé des coïncidences troublantes entre les deux romans4.En mai 1996, le tribunal de grande instance de Paris juge que son roman Le Petit Prince de Belleville est une « contrefaçon partielle » d'un roman de Howard Buten, Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué. Calixthe Beyala ne fait pas appel7.Selon Hélène Maurel-Indart, Calixthe Beyala aurait également plagié La Vie devant soi de Romain Gary (Goncourt 1975)8. D'autres de ses récits ont été suspectés d'emprunts puisés chez Ben Okri, Paule Constant, Charles Williams et Alice Walker5,9. Lors d'une entrevue avec la journaliste Catherine Argand pour le magazine Lire, l'écrivain Paule Constant déclare : « elle n'est pas la seule à m'avoir plagiée10,11 ».Activisme et démêlés judiciairesCalixthe Beyala critique la sous-représentation des minorités visibles dans le paysage audiovisuel français. Elle est l'initiatrice et la porte-parole de l'association collectif Égalité, fondée en décembre 199812, dont deviennent également membres l'humoriste Dieudonné, le chanteur Manu Dibango et Luc Saint-Éloy13. En 1998, elle dépose plainte contre le CSA et le gouvernement français devant l'absence de Noirs à la télévision. Cette démarche conduit le collectif à être reçu, en octobre 1999, par le président du CSA de l'époque, Hervé Bourges14. En 2000, elle monte avec Luc Saint-Éloy sur la scène de la cérémonie des César du cinéma pour y revendiquer une plus grande présence des minorités sur les écrans français.Elle y rend également hommage à la comédienne Darling Légitimus, décédée en décembre 1999, que les organisateurs de l'événement n'avaient pas citée lors de leur hommage aux comédiens disparus au cours de l'année précédente. Le 22 février 2005, elle intervient dans le quotidien Le Monde pour réfuter toute « hiérarchie dans la souffrance », lancer un appel au dialogue entre Noirs et Juifs, et condamner les positions prises par Dieudonné15. Dans le Figaro du 12 décembre 200716 et l'émission télévisée Revu et Corrigé sur France 5, elle se distingue en saluant la visite de Mouammar Kadhafi en France, et ses actions politiques en tant que dirigeant libyen et africain.Elle s'est également engagée pour la lutte contre le sida, la promotion de la francophonie, la Maison des peuples d'Afrique. Elle est membre du comité de parrainage de la Coordination française pour la Décennie de la culture de paix et de non-violence. Son action associative et ses prises de positions militantes ont été récompensées par le prix de l'Action communautaire en 2000, et elle a reçu le prix Genova 20023.Calixthe Beyala a intenté un procès à Michel Drucker, dont elle dit avoir été la maîtresse, auquel elle reproche de ne pas avoir été payée pour sa contribution à un livre de l'animateur (auquel elle a consacré un roman à clé, L'Homme qui m'offrait le ciel)17. En première instance en juin 2009, elle perd ce procès mais en appel, en janvier 2011, Michel Drucker est condamné à lui verser 40 000 euros18.En janvier 2011, elle prend fait et cause pour Laurent Gbagbo qui avait été déclaré perdant par les Nations unies des élections présidentielles ivoiriennes de 201019, accusant plus tard, lors d'une interview sur I>Télé20, les forces d'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) d'avoir envahi la Côte d'Ivoire, puis contestant la valeur et les conclusions des enquêtes conduites par Human Rights Watch21.En mars 2008, Calixthe Beyala suscite une forte réprobation, lorsqu'elle s'exprime en faveur du dictateur libyen Kadhafi22.Calixthe Beyala est une écrivaine engagée qui use de la provocation et du scandale pour attirer l'attention sur ce qu'elle juge être des injustices. Ainsi ses romans, à l'instar de Femme nue, femme noire (2003), suscitent autant d'indignation que d'enthousiasme. Ainsi érotisme et pornographie finissent par se confondre dans le « capitalisme outrancier qui impose sa loi »23. Son engagement littéraire en dernière analyse, au-delà du paradoxe entre moyens littéraires et objectif moral, vise à dénoncer la mondialisation dans son entreprise d'uniformisation des esprits : « son écriture recourt aux procédés les plus communs à la vox populi comme le plagiat et le cliché tout en versant dans le registre populaire afin de dénoncer les dangers d'une mondialisation qui formate l'humanité égoïste par la valorisation d'une culture consumériste et hédoniste24 ».Œuvre• C'est le soleil qui m'a brûlée, Paris, Stock, 1987, 174 p.• Tu t'appelleras Tanga, Paris, Stock, 1988, 202 p.• Seul le Diable le savait, Paris, Pré aux Clercs, 1990, 281 p.• La Négresse rousse, Paris, J'ai lu, 1995.• Le Petit Prince de Belleville, Paris, Albin Michel, 1992, 262 p.• Maman a un amant, Paris, Albin Michel, 1993, 352 p. Grand Prix Littéraire de l'Afrique noire ;• Asséze l'Africaine, Paris, Albin Michel, 1994, 352 p. Prix François-Mauriac de l'Académie française ; prix Tropique.• Lettre d'une africaine à ses sœurs occidentales, Paris, Spengler, 1995, 160 p.• Les Honneurs perdus, Paris, Albin Michel, 1996, Grand Prix du roman de l'Académie française ;• La Petite Fille du réverbère, Paris, Albin Michel, 1998, 412 p. Grand prix de l'Unicef ;• Amours sauvages, Paris, Albin Michel, 1999, 251 p.• Lettre d'une Afro-française à ses compatriotes, Paris, Mango, 2000, 96 p.• Comment cuisiner son mari à l'africaine, Paris, Albin Michel, 2000, 170 p.• Les Arbres en parlent encore…, Paris, Albin Michel, 2002, 412 p.• Femme nue, femme noire, Paris, Albin Michel, 2003, 230 p.• La Plantation, Paris, Albin Michel 2005, 464 p.• L'Homme qui m'offrait le ciel, Paris, Albin Michel, 2007.• Le Roman de Pauline, Paris, Albin Michel, 2009.• Les Lions indomptables, Paris, Albin Michel, 2010.
CHEIKH ANTA DIOPCheikh Anta DiopNé le 29 décembre 1923 à Thieytou - mort le 7 février 1986 à Dakarest un historien et anthropologue sénégalais.Il a mis l'accent sur l'apport de l'Afrique et en particulier de l'Afrique noire à la culture et à la civilisation mondiales. Ses thèses restent aujourd'hui contestées, et sont peu reprises dans la communauté scientifique1,2,3. Si une partie importante de ses arguments scientifiques sont considérés comme fallacieux, Cheikh Anta Diop a eu toutefois un rôle indéniable de visionnaire concernant la place de l'Afrique dans l'histoire. En effet, sa vision est, d'une certain façon, une anticipation des découvertes archéologiques majeures des années 2000 sur le continent africain que ce soit Kerma ou, beaucoup plus ancien, Blombos.L'homme et l'œuvreCheikh Anta Diop est né le 29 décembre 1923 à Thieytou, dans la région de Diourbel (Sénégal). Sa famille est d'origine artistocratique wolof. À l'âge de 23 ans, il part pour Paris afin d'étudier la physique et la chimie mais se tourne aussi vers l'histoire et les sciences sociales. Il suit en particulier les cours de Gaston Bachelard et de Frédéric Joliot-Curie4. Il adopte un point de vue spécifiquement africain face à la vision de certains auteurs de l'époque selon laquelle les Africains sont des peuples sans passé.En 1951, Diop prépare sous la direction de Marcel Griaule une thèse de doctorat à l'Université de Paris, dans laquelle il affirme que l'Égypte antique était peuplée d'Africains noirs5, et que la langue et la culture égyptiennes se sont ensuite diffusées dans l'Afrique de l'Ouest. Il ne parvient pas dans un premier temps à réunir un jury mais, d'après Doué Gnonsoa, sa thèse rencontre un « grand écho » sous la forme d'un livre, Nations nègres et culture, publié en 19546. Il obtiendra finalement son doctorat en 1960.Il poursuit dans le même temps une spécialisation en physique nucléaire au laboratoire de chimie nucléaire du Collège de France. Diop met à profit sa formation pluridisciplinaire pour combiner plusieurs méthodes d'approche.Il s'appuie sur des citations d'auteurs anciens comme Hérodote7 et Strabon pour illustrer sa théorie selon laquelle les Égyptiens anciens présentaient les mêmes traits physiques que les Africains noirs d'aujourd'hui (couleur de la peau, aspect des cheveux, du nez et des lèvres). Son interprétation de données d'ordre anthropologique (comme le rôle du matriarcat) et archéologique l'amène à conclure que la culture égyptienne est une culture nègre. Sur le plan linguistique, il considère en particulier que le wolof, parlé aujourd'hui en Afrique occidentale, est phonétiquement apparenté à la langue égyptienne antique.Lorsqu'il obtient son doctorat en 1960, il revient au Sénégal enseigner comme maître de conférences à l'université de Dakar (depuis rebaptisée université Cheikh-Anta-Diop, UCAD)8. Il y obtiendra en 1981 le titre de professeur. Mais dès 1966, il crée au sein de cette université de Dakar le premier laboratoire africain de datation des fossiles archéologiques au radiocarbone9, en collaboration avec celui du Commissariat français à l'énergie atomique (CEA) de Gif-sur-Yvette.Il y effectue des tests de mélanine sur des échantillons de peau de momies égyptiennes, dont l'interprétation permettrait, selon Diop, de confirmer les récits des auteurs grecs anciens sur la mélanodermie des anciens Égyptiens10.Dans les années 1970, Diop participe au comité scientifique qui dirige, dans le cadre de l'UNESCO, la rédaction d'une Histoire générale de l'Afrique. Pour la rédaction de cet ouvrage, il participe en 1974 au Colloque international du Caire où il confronte les méthodes et résultats de ses recherches avec ceux des principaux spécialistes mondiaux. À la suite de ce colloque international, il lui est confié la rédaction du chapitre consacré à l'origine des anciens Égyptiens.Le rapport final11 du colloque mentionne l'accord des spécialistes — à l'exception de l'un d'entre eux — sur les éléments apportés par Cheikh Anta Diop et Théophile Obenga au sujet de la filiation entre la culture égyptienne ancienne et les cultures africaines. Ainsi, pour le professeur Jean Vercoutter, « l'Égypte était africaine dans son écriture, dans sa culture et dans sa manière de penser ».Le professeur Leclant a reconnu ce même caractère africain dans le tempérament et la manière de penser des Égyptiens. La communauté scientifique reste néanmoins partagée sur la nature du peuplement de l'Égypte ancienne : principalement composé de Noirs jusqu'à la perte de l'indépendance pour certains, mixte selon d'autres experts.Par ailleurs, dès 1947, Diop s'est engagé politiquement en faveur de l'indépendance des pays africains et de la constitution d'un État fédéral en Afrique. « Jusqu'en 1960, il lutte pour l'indépendance de l'Afrique et du Sénégal et contribue à la politisation de nombreux intellectuels africains en France. Entre 1950 et 1953, il est secrétaire général des étudiants du Rassemblement démocratique africain12 et dénonce très tôt, à travers un article paru dans La Voix de l'Afrique noire, l'Union française, qui, « quel que soit l'angle sous lequel on l'envisage, apparaît comme défavorable aux intérêts des Africains ». Poursuivant la lutte sur un plan plus culturel, il participe aux différents congrès des artistes et écrivains noirs et, en 1960, il publie ce qui va devenir sa plate-forme politique : Les fondements économiques et culturels d'un futur État fédéral en Afrique noire13. »Selon Doué Gnonsoa, Diop sera l'un des principaux instigateurs de la démocratisation du débat politique au Sénégal, où il animera l'opposition institutionnelle au régime de Léopold Sédar Senghor, à travers la création de partis politiques (le FNS en 1961, le RND en 1976), d'un journal d'opposition (Siggi, renommé par la suite Taxaw) et d'un syndicat de paysans. Sa confrontation, au Sénégal, avec le chantre de la négritude serait l'un des épisodes intellectuels et politiques les plus marquants de l'histoire contemporaine de l'Afrique noire14.Cheikh Anta Diop meurt dans son sommeil à Dakar, le 7 février 1986. Avec Théophile Obenga et Asante Kete Molefe, il est considéré comme l'un des inspirateurs du courant épistémologique de l'afrocentricité. En 1966, lors du premier Festival mondial des Arts nègres de Dakar, Diop a été distingué comme « l'auteur africain qui a exercé le plus d'influence sur le XXe siècle15 ».Le 8 février 2008, le ministre de la Culture du Sénégal Mame Birame Diouf inaugure un mausolée perpétuant la mémoire du chercheur à Thieytou, son village natal où il repose16. Ce mausolée figure sur la liste des sites et monuments classés du Sénégal17.La théorie historiographique de Cheikh Anta DiopCheikh Anta Diop a rassemblé les résultats de ses travaux dans le dernier ouvrage qu'il ait publié avant son décès, intitulé Civilisation ou barbarie, anthropologie sans complaisance18, où il expose sa théorie historiographique, tout en tentant de répondre aux principales critiques que son œuvre a suscitées chez les historiens et « égyptologues de mauvaise foi »19.Antériorité des civilisations nègresSelon Diop20, l'Homme (Homo sapiens) est apparu sous les latitudes tropicales de l'Afrique, dans la région des Grands Lacs. La chaîne d'hominisation africaine est la seule qui soit complète, la plus ancienne et la plus prolifique. Ailleurs on trouve actuellement encore des fossiles humains représentant des maillons épars d'une séquence d'hominisation incertaine.Diop pose que les premiers Homo sapiens devaient être probablement de phénotype noir, parce que, selon la règle de Gloger, les êtres vivants originaires des latitudes tropicales sécrètent plus de mélanine dans leur épiderme, afin de se protéger des rayonnements solaires. Ce qui leur confère une carnation aux nuances les plus sombres (ou les moins claires). Pour lui, pendant des millénaires, il n'y a eu d'hommes sur terre que des « Nègres20 », nulle part ailleurs dans le monde qu'en Afrique, où les plus anciens ossements d'hommes « modernes » découverts ont plus de 150 000 ans21 ; tandis qu'ailleurs les plus vieux fossiles humains (ex. Proche-Orient) ont environ 100 000 ans.Selon Günter Bräuer, les fossiles humains sont d'autant plus anciens qu'ils se trouvent en Afrique, au cœur de l'Afrique. Tandis qu'ils sont d'autant plus récents qu'ils se trouvent hors et loin de l'Afrique22. D'après Yves Coppens, aucune exception n'a encore été apportée à cette règle de cohérence de la théorie « Out of Africa », qui reste la seule à présenter un si haut degré de stabilité23.Si l'Afrique est le « berceau de l'humanité », alors, selon Diop, les plus anciens phénomènes civilisationnels ont dû nécessairement avoir eu lieu sur ce continent24. Selon Nathalie Michalon, né en Afrique25, l'homme y expérimente les plus anciennes techniques culturelles avant d'aller conquérir la planète, précisément grâce à elles. C'est ainsi que l'Afrique est l'un des endroits au monde (avec la Mésopotamie et la Chine) où la fabrication d'outils (lithiques), la poterie, la sédentarisation, la domestication, l'agriculture, la cuisson, etc. sont attestées et notamment dans le site de Nabta Playa26.Selon Diop27, comme l'Afrique a une superficie approximative de 30 millions de kilomètres carrés, on imagine que la seule hominisation de tout cet espace a dû prendre plusieurs millénaires. En sorte que les fossiles/phénomènes humains de la moitié sud de l'Afrique sont généralement plus anciens que ceux de sa moitié nord. Selon un Bulletin de l'IFAN, cette immensité géographique du premier environnement d'Homo sapiens, compte tenu de sa grande diversité climatique, a eu pour autre conséquence de différencier très tôt l'humanité africaine, des points de vue phénotypique et morphologique27.Au bout de plusieurs autres millénaires, des colonies humaines auraient émigré dans les régions limitrophes de l'Afrique, là où sont attestés les plus anciens fossiles humains après ceux de l'Afrique, c'est-à-dire en Asie méridionale et en Europe méridionale. La principale cause naturelle des premières migrations humaines résiderait dans les évolutions climatiques : en la succession de périodes pluvieuses et de sécheresses en Afrique, correspondant respectivement à des périodes de glaciation et/ou de précipitations dans ses contrées limitrophes, en Europe méridionale et au Proche-Orient. Selon Diop, Homo sapiens aurait suivi, dans les premiers temps, la disponibilité naturelle des ressources alimentaires (animales et végétales) au gré des conjonctures climatiques ; en empruntant toujours les voies naturelles de sortie de l'Afrique (Sicile, Italie du Sud, isthme de Suez, détroit de Gibraltar)28. Selon le site internet Hominides, les catalyseurs culturels de cette migration consisteraient dans la maîtrise du feu29, permettant de vivre dans des contrées tempérées, et, selon Diop, l'invention de la navigation30, permettant de traverser de vastes étendues aquatiques.Selon Théophile Obenga, jusqu'à la première moitié du XXe siècle, cette perspective historiographique de Diop est aux antipodes de ce qui est communément diffusée31 depuis Hegel, Hume, Kant, Rousseau, Hobbes, Marx, Weber, Renan, etc., en sorte que son Nations nègres et culture serait le premier ouvrage de cette envergure à étudier l'histoire de l'Afrique antérieure aux traites négrières arabe et européenne, dans les temps les plus anciens. Toujours selon Obenga, Diop introduit une profondeur diachronique qu'il n'y avait pas ; à la différence radicale des travaux ethnologiques ou anthropologiques généralement anhistoriques31. « Le livre le plus audacieux qu'un nègre ait jamais écrit », en dira Aimé Césaire dans son Discours sur le colonialisme.L'Égypte comme une civilisation négro-africaineL'égyptologie « afrocentrée » est un domaine de recherche initié par Cheikh Anta Diop, où l'on étudie la civilisation de l'Égypte ancienne en partant du postulat qu'elle est une civilisation négro-africaine. En effet, selon Diop, la civilisation égyptienne serait une civilisation « nègre ».Par ses habitantsAuteurs anciensDiop rapporte que selon Hérodote, Aristote, Strabon et Diodore de Sicile les Égyptiens avaient la peau « noire »32. Il signale également l'opinion du comte de Volney33, pour qui les Égyptiens seraient les descendant de « nègres ». D'autres auteurs, comme Mubabinge Bilolo, reprendront et développeront cet argument. La plupart des égyptologues contestent cette thèse en se basant sur les milliers de représentations humaines figurant dans les tombes ou les temples d'époque pharaonique : lorsque les Égyptiens y font figurer d'autres peuples, comme les Syriens, les Libyens, ils leur donnent d'autres traits et d'autres vêtements (les Syriens portent la barbe et une robe, par exemple). Or ils ont maintes fois représenté les Noirs du Soudan, le pays de Kouch, avec des traits africains et une peau noire, alors qu'ils se représentaient eux-mêmes avec une peau claire et des traits proches de ceux des Égyptiens modernes.KemetSelon Cheikh Anta Diop, par l'expression Kemet, les Égyptiens se seraient désignés dans leur propre langue comme un peuple de « Nègres »34.À l'appui de sa thèse, il invoque une graphie « insolite35 » de km.t montrant un homme et une femme assis, graphie traduite par « les Égyptiens », mais que l'égyptologue afrocentrique Alain Anselin traduit comme « une collectivité d'hommes et de femmes noirs36 ». On n'en connaît qu'une seule occurrence37, dans un texte littéraire du Moyen Empire.En égyptien ancien, Kemet s'écrit avec comme racine le mot km, « noir », dont Diop pense qu'il est à l'origine étymologique de « la racine biblique kam ». Pour lui, les traditions juive et arabe classent généralement l'Égypte comme un des pays de Noirs38. En outre, selon Diop, le morphème km a proliféré dans de nombreuses langues négro-africaines où il a conservé le même sens de « noir, être noir » ; notamment dans sa langue maternelle, le wolof, où khem signifie « noir, charbonner par excès de cuisson », ou en pulaar, où kembu signifie « charbon ». Selon la plupart des égyptologues, si l'Égypte était appelée le "pays noir" à l'époque pharaonique, c'était par référence à la couleur de la terre, fertile car irriguée par le Nil, qui se différenciait du désert environnant, de couleur sable ou jaune.Tests de mélanineSelon Cheikh Anta Diop, les procédés égyptiens de momification ne détruisent pas l'épiderme au point de rendre impraticables les différents tests de la mélanine permettant de connaître leur pigmentation. Au contraire, eu égard à la fiabilité de tels tests, il s'étonne qu'ils n'aient pas été généralisés sur les momies disponibles. Sur des échantillons de peau de momie égyptienne « prélevés au laboratoire d'anthropologie physique du musée de l'Homme à Paris », Cheikh Anta Diop a réalisé des coupes minces, dont l'observation microscopique à la lumière ultraviolette lui fait « classer indubitablement les anciens Égyptiens parmi les Noirs »39.Par sa langueL'argument linguistique de Diop comporte deux volets40. D'une part, l'auteur essaie de prouver que l'égyptien ancien n'appartient pas à la famille afroasiatique41. D'autre part, il tente d'établir positivement la parenté génétique de l'égyptien ancien avec les langues négro-africaines contemporaines42.Ainsi, d'après Diop et Obenga, les langues négro-africaines contemporaines et l'égyptien ancien ont un ancêtre linguistique commun, dont la matrice théorique (ou « ancêtre commun prédialectal ») aurait été reconstituée par Obenga, qui l'a baptisée « négro-égyptien ».La langue maternelle de Cheikh Anta Diop est le wolof, et il apprend l'égyptien ancien lors de ses études d'égyptologie, ce qui, selon Diop, lui aurait permis de voir concrètement qu'il y avait des similitudes entre les deux langues43. Il a donc tenté de vérifier si ces similitudes étaient fortuites, empruntées ou filiales.Diop observe une « loi de correspondance » entre n en égyptien et l en wolof. Il observe également que, en présence d'un morphème ayant une structure nd en égyptien, on rencontre généralement un morphème équivalent en wolof de structure ld. Le spécialiste de la linguistique historique Ferdinand de Saussure a établi que ce type de correspondances régulières n'est presque jamais fortuit en linguistique, et que cela a force de « loi » phonologique, dite sound law44.Pour Diop, la structure consonantique du mot égyptien (nd) est la même que celle du mot wolof (ld), sachant que souvent les voyelles ne sont pas graphiées en égyptien, même si elles sont prononcées. Cela veut dire, selon lui, que, là où l'on note a pour l'égyptien, il est possible de rencontrer une toute autre voyelle dans le morphème wolof équivalent. Dans ce cas la correspondance ne serait approximative qu'en apparence, car c'est la phonétisation (la prononciation) de l'égyptien selon les règles de prononciation sémitiques qui serait erronée. Bien entendu une telle loi ne se déduit pas de deux ou trois exemples, elle suppose l'établissement de séries lexicales exhaustives, comme on en trouve dans les ouvrages dédiés de Diop45. La méthodologie de comparaison de Diop est rejetée par des linguistes modernes, comme Russell Schuh46.Par la culture spirituelleCosmogonieSelon Cheikh Anta Diop47, la comparaison des cosmogonies égyptiennes avec les cosmogonies africaines contemporaines (Dogon, Ashanti, Agni, Yoruba48, etc.) montre une similitude radicale qui témoigne selon lui d'une commune parenté culturelle. Il avance une similitude du Dieu-Serpent dogon et du Dieu-Serpent égyptien, ou encore celle du Dieu-Chacal dogon incestueux et du Dieu-Chacal égyptien incestueux. L'auteur invoque également les isomorphies Noun/Nommo, Amon/Ama ; de même que la similitude des fêtes des semailles et autres pratiques cultuelles agraire ou cycliques.TotémismeLe totem est généralement un animal considéré comme une incarnation de l'ancêtre primordial d'un clan. À ce titre, ledit animal (ou parfois un végétal) fait l'objet de tabous qui déterminent des attitudes cultuelles spécifiques au clan, qu'on désigne par le terme de totémisme. Selon Diop49, cette institution et les pratiques cultuelles afférentes sont attestées en Égypte tout comme dans les autres cultures « négro-africaines ».
CHEIKH ANTA DIOP
Circoncision et excisionSelon Diop50, les Égyptiens pratiquaient la circoncision dès la période prédynastique. Se fondant sur un témoignage d'Hérodote dans Euterpe, il pense que cette institution se serait diffusée aux populations sémitiques depuis l'Égypte. Elle est attestée dans d'autres cultures « négro-africaines », notamment chez les Dogons où elle est le pendant de l'excision. Ainsi, pour Diop, circoncision et excision sont des institutions duelles de sexuation sociale ; celles-ci résulteraient des mythes cosmogoniques de l'androgynie originelle de la vie, en particulier de l'humanité (il cite l'exemple de l'androgynie d'Amon-Râ). L`excision demeure pratiquée en Egypte moderne (elle fut même combattue récemment par Suzanne Moubarak)Par sa sociologieRoyauté sacréeSelon Josep Cervello Autuori, la royauté égyptienne emporte une dimension sacerdotale comme ailleurs en Afrique noire51. Mais, selon Diop52, un trait encore plus singulier commun aux souverains traditionnels africains consiste en « la mise à mort rituelle du roi »53. Cette pratique serait attestée, notamment chez les Yorouba, Haoussa, Dagomba, Tchambas, Djoukons, Igara, Songhoy, Shillouks. Selon Diop, les Égyptiens auraient également pratiqué le régicide rituel, qui serait devenu progressivement symbolique, à travers la fête du Sed, un rite de revitalisation de la royauté54.MatriarcatPour Diop55, le matriarcat est au fondement de l'organisation sociale « négro-africaine ». Aussi serait-il attesté comme tel en Égypte ancienne : aussi bien à travers le matronymat que par la distribution matrilinéaire des pouvoirs publics.Stratification socialeSelon Diop56, la société égyptienne ancienne était structurée hiérarchiquement de la même façon que les autres sociétés « négro-africaines » anciennes. Du bas de l'échelle socioprofessionnelle en montant, la stratification sociale se composerait de :paysans,ouvriers spécialisés, appelés « castes » ailleurs en Afrique noire,guerriers, prêtres, fonctionnaires,Roi sacré, appelé « Pharaon » en égyptologie.Par sa culture matérielleLes plus vieux ustensiles et techniques de chasse, pêche, agriculture attestés en Égypte sont similaires à ceux connus dans les autres régions de l'Afrique. De même que les différentes coiffures et leurs significations, les cannes et sceptres royaux.[réf. nécessaire] Les travaux d'Aboubacry Moussa Lam sont particulièrement décisifs pour ce champ de la recherche ouvert par Diop.L'ensemble des différents types d'arguments que les afrocentristes invoquent mobilise diverses disciplines scientifiques, et constitue d'après eux un « faisceau de preuves », c'est-à-dire un système argumentaire global, ayant sa propre cohérence interne qui l'établit comme un paradigme épistémologique autonome.Toutefois, la préoccupation de Diop consiste moins à innover en matière d'historiographie de l'Afrique, qu'à connaître profondément l'histoire de l'Afrique en vue d'en tirer les enseignements utiles pour agir efficacement sur son avenir. Il ne s'agit pas davantage de s'enorgueillir puérilement de quelque passé glorieux, mais de bien connaître d'où l'on vient pour mieux comprendre où l'on va. D'où sa remarquable prospective politique dans Les fondements culturels, techniques et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire (Présence africaine, 1960) ; et son implication concrète dans la compétition politique au Sénégal, son pays natal.Postérité de ses travauxNombre d'auteurs, tout en reconnaissant que Diop a eu le mérite de libérer la vision de l'Égypte ancienne de son biais européocentriste, restent partagés sur certaines de ses conclusions. Certains chercheurs africanistes contestent l'insistance de Diop sur l'unité culturelle de l'Afrique noire. D'autres estiment que son approche pluridisciplinaire l'amène à des rapprochements sommaires dans certains domaines comme la linguistique, ou que ses thèses entrent en contradiction avec les enseignements académiques de l'archéologie et de l'histoire de l'Afrique et en particulier de l'Égypte. Ses travaux ne sont pas considérés comme une source fiable par une partie des historiens actuels qui affirment qu'ils ne suscitent l'intérêt que sur le plan de l'historiographie de l'Afrique et non sur celui de la connaissance de son passé.Diop lui-même, dans l'avant-propos de Nations nègres et culture, ne faisait pas mystère de la difficulté qu'il avait rencontrée pour faire preuve de rigueur face à l'immensité de la tâche à laquelle il s'était attelé. La remise en contexte de son œuvre incite à rappeler l'isolement de ce chercheur qui remet en cause, avec très peu d'aide extérieure, plusieurs siècles d'études égyptologiques, menées par des égyptologues de renom (Jacques-Joseph Champollion et son frère, ou encore Gaston Maspero) :« L'ensemble du travail [sa thèse et le livre qui en découle] n'est qu'une esquisse ou manquent toutes les perfections de détail. Il était humainement impossible à un seul individu de les y apporter : ce ne pourra être que le travail de plusieurs générations africaines. Nous en sommes conscients et notre besoin de rigueur en souffre [...]57. »Pour Mubabinge Bilolo, les rapprochements sommaires ne constituent pas un point négatif, car pour lui Diop est un pionnier qui a ouvert des perspectives, tracé des pistes de recherche et laissé une série de tâches pour les futures générations58.L'Égypte, une ÉthiopieL'idée d'une Égypte ancienne noire avait déjà été avancée par d'autres auteurs, mais l'œuvre de Cheikh Anta Diop est fondatrice dans la mesure où elle a considérablement approfondi l'étude du rôle de l'Afrique noire dans les origines de la civilisation. Elle a donné naissance à une école d'égyptologie africaine en inspirant par exemple Théophile Obenga, Mubabinge Bilolo et Molefi Kete Asante. Diop a participé à l'élaboration d'une conscience africaine libérée de tout complexe face à la vision européenne du monde. Les travaux de Cheikh Anta Diop, entre autres, ont donné naissance à un courant historiographique dit afrocentriste. Sur le plan linguistique, il a initié l'étude diachronique des langues africaines et a défriché l'histoire africaine précoloniale (hors période pré-égyptienne largement commentée). Désormais, le fait que l'Égypte soit une civilisation africaine n'est pas remis en cause par les égyptologues et les preuves archéologiques s'accumulent même depuis quelques années59Linguistique historique africaineSelon Cheikh Anta Diop60, il existe des correspondances syntaxiques, morphologiques, phonologiques et grammaticales régulières entre les langues négro-africaines, notamment le wolof, et l'égyptien ancien61. Il considère que les lois de correspondances observées entre égyptien ancien et wolof n'existent pas entre égyptien ancien et hébreu, arabe, ou berbère.Sa démarche dite de « linguistique historique africaine » sera généralisée par Théophile Obenga à de nombreuses autres langues négro-africaines, notamment le mbochi, sa langue maternelle. Oum Ndigi62 a réalisé des études similaires sur le basa63. Aboubacry Moussa Lam a travaillé dans ce sens pour le peul64. Alain Anselin a relevé de nombreuses similitudes régulières en ce qui concerne la « grammaire du verbe, du geste et du corps en égyptien ancien et dans les langues négro-africaines modernes »65. Ainsi, toute une école de linguistique historique africaine est née de ces recherches, dont les auteurs et la publication sont désormais conséquents66. Obenga a renommé « négro-égyptien » la théorie générale de cette linguistique historique africaine67.ArchéologieSur le site de Blombos ont été exhumées les plus anciennes œuvres d'art jamais trouvées68. Elles datent de plus de 70 000 ans. Sur le site de Kerma, les travaux du Suisse Charles Bonnet ont prouvé l'originalité et la richesse de la civilisation de Kerma (–3000/–1500) 69 par rapport à l'Égypte pharaonique.ÉpigraphieL'égyptologue Alain Anselin a cherché à démontrer l'africanité de l'écriture hiéroglyphique. Pour lui, « si l'absence répétée des paires d'homophones nécessaires à l'établissement du code hiéroglyphique dans une famille de langues donnée rend difficile d'affirmer que cet univers linguistique puisse rendre compte de l'élaboration de l'écriture hiéroglyphique », il considère que le « paradigme africain » serait doté d'un « pouvoir explicatif » plus grand, que le « paradigme sémitique » qu'il considère comme biaisé70. Anselin estime également que les hiéroglyphes photographient les milieux écologique et sociétal qui les ont vu naître. Or, la faune et la flore des signes scripturaux égyptiens sont, selon lui, africaines, notamment de la région des Grands Lacs, au cœur de l'Afrique et l'ichthyonomie égyptienne présenterait des similitudes avec les noms de poissons dans diverses langues négro-africaines contemporaines.[réf. nécessaire]Babacar Sall relève que dans la sign list de la grammaire égyptienne d'Alan H. Gardiner71 les symboles relatifs aux instruments de la pêche et de la chasse sont particulièrement nombreux, et estime qu'ils correspondent à des pratiques et techniques attestées dans toute l'Afrique noire, encore de nos jours72.Anthropologie politiqueLes comparaisons de Diop entre l'institution de Pharaon et, entre autres, celle du Damel de Cayor ou du Mogho Naba du Mossi ont suscité d'autres recherches, notamment par Alain Anselin, mais également Cervello Autuori. Selon ce dernier auteur, l'institution politique dite de « la royauté sacrée » (E. E. Evans-Pritchard, Luc de Heusch, Michel Izard) serait attestée en Égypte comme ailleurs en Afrique ; de même que la pratique ancestrale du régicide rituel. Le Pharaon, le Mansah, le Mwene ou le Mogho Naba sont des institutions structuralement analogues : sacerdotales et en même temps politiques. Elles se distinguent radicalement du « Roi »73 :« La monarchie pharaonique fut-elle une royauté divine africaine ? Tout d'abord, il convient de remarquer qu'en Égypte le dieu-qui-meurt est Osiris et que, comme dans le cas des rois divins africains mais à la différence des autres dieux-qui-meurent d'Europe et du Proche-Orient anciens, Osiris est aussi roi (...). Comme les rois africains, Osiris est la personnification du principal aliment de la communauté, la céréale, l'orge (cf., par ex., Mystère de la succession, scène 9, 29-32 ; Textes des sarcophages, 269, 330 ; Luttes d'Horus et Seth, 14, 10 ; Textes du sarcophage d'Ankhnesneferibre, 256-302 ; Plutarque, Isis et Osiris, 36, 41, 65, 70 ; cf. aussi les “Osiris végétants”, représentations du dieu en argile dans lesquelles sont enfoncées des graines de céréale qui finissent par germer), et lui-même ou bien les humeurs qui émanent de son cadavre s'identifient avec le Nil ou avec les eaux fécondantes de la crue (cf. Textes des Pyramides, 39, 117, 788, 848, 1360 ; Hymne de Ramsès IV à Osiris). La capitale de l'Égypte, Memphis, est un centre qui diffuse l'abondance parce que le cadavre d'Osiris flotta dans les eaux du Nil à sa hauteur et qu'il y fut enterré (Théologie memphite, 61-62, 64). C'est qu'Osiris, roi-dieu mort, dispense l'abondance précisément dans sa condition de mort, d'être sacrifié (Frankfort, 1948, chap. 2). En plus d'être le dieu-qui-meurt, Osiris est aussi le premier ancêtre de la royauté (être individuel) et, en tant que roi mort, celui auquel s'identifient tous les rois en mourant (être collectif). Osiris se ressemble donc en tous aspects au roi-dieu africain. (...) Pour conclure, nous pourrions nous demander comment s'explique cette parenté et, en général, comment s'expliquent les nombreux parallélismes qui existent entre l'Égypte et l'Afrique. Certains auteurs ont parlé de diffusion, d'autres de convergence. Nous préférons, quant à nous, la notion de “substrat culturel pan-africain”, compris comme un patrimoine culturel commun qui aurait eu son origine à l'époque néolithique et dont auraient émergé, ici et là dans l'espace et dans le temps, les diverses civilisations africaines historiques et actuelles. »Les travaux de Diop dans ce domaine ont notamment inspiré l'ouvrage intitulé Conception bantu de l'autorité, suivie de Baluba : Bumfumu ne BuLongolodi (Publications universitaires africaines, Munich/Kinshasa, 1994) des auteurs Kabongu Kanundowi et Bilolo Mubabinge.Critique de ses travauxBien que démonstration ait été faite avant les travaux de Diop que l'égyptien n'appartient pas au groupe sémitique des langues afroasiatiques, il n'en résulte pas nécessairement qu'elle n'appartient pas au phylum afroasiatique74. Ainsi, le linguiste comparatiste A. Loprieno75 notamment76 relève les caractéristiques communes à l'égyptien et aux autres langues afroasiatiques : entre autres la présence de racines bi- et trilitères, constantes dans les thèmes verbaux et nominaux qui en dérivent ; la fréquence de consonnes glottales et laryngales, la plus caractéristique étant l'occlusive laryngale ?ayn ; le suffixe féminin *-at ; le préfixe nominal m- ; le suffixe adjectival –i (le nisba arabe). À la Conférence internationale de Toulouse (septembre 2005), Alain Anselin, quant à lui, « a délivré une communication portant sur les noms de nombres en égyptien ancien où il considère deux courants d'influence, l'un tchado-égyptien, l'autre égypto-sémitique »77. La parenté génétique de l'égyptien ancien avec les langues négro-africaines contemporaines est pareillement contestée par certains philologues et lexicologues. Ainsi, Henry Tourneux, spécialiste des langues africaines (mbara, fulfulde, munjuk, kotoko…) et membre de l'unité mixte de recherche Langage, Langues et Cultures d'Afrique noire (CNRS)78, observe que « la coïncidence de trois langues non contiguës » ne garantit pas « le caractère commun, “négro-égyptien”, d'un mot » : en effet, il ne suffit pas qu'un fait linguistique soit attesté dans deux langues non contiguës du « négro-africain » contemporain (la troisième langue étant l'égyptien ancien ou le copte) ni que les champs sémantiques soient identiques pour que l'on ait la preuve que le fait linguistique en question relève d'une hypothétique matrice « négro-égyptienne »79.Les critiques d'Henry Tourneux ont fait l'objet d'une réponse circonstanciée de Théophile Obenga dans Le sens de la lutte contre l'africanisme eurocentriste80, où il estime que son contradicteur n'est pas compétent en matière de linguistique historique comparative, ni même spécialiste de la langue égyptienne. En effet, Henry Tourneux est « spécialiste des langues tchadiques et de la lexicographie peule81 ». Par ailleurs, d'après Obenga, aucun linguiste spécialiste de linguistique historique n'a encore contesté ses travaux ni ceux de Diop, particulièrement en ce qui concerne la régularité des propriétés communes aux langues négro-africaines, au copte et à l'égyptien ancien. Or, toujours selon Théophile Obenga, c'est très précisément cette régularité, faisant force de loi linguistique, qui fonde sa théorie générale du « négro-égyptien » : des similitudes éparses, irrégulières entre les langues ou groupes de langues comparées pouvant relever ou bien de coïncidences ou — plus sûrement en l'espèce du paradigme afroasiatique — d'emprunts réciproques de langues dont les locuteurs sont géographiquement mitoyens depuis des millénaires. Pour Obenga, le fait même que les langues africaines modernes ne soient pas contemporaines de l'égyptien ancien, et que beaucoup de ces langues soient attestées à des milliers de kilomètres de l'Égypte, serait un argument favorable à sa théorie linguistique du « négro-égyptien »82. Toutefois les théories linguistiques d'Obenga ne sont pas reconnues par les enquêtes linguistiques actuellement en cours83, on leur a reproché leur manque de sérieux84, et leur instrumentalisation politique85.Sont également critiqués les tests menés par Cheik Anta Diop relatifs à la pigmentation de l'épiderme des pharaons, qui selon lui prouverait qu'ils étaient « Noirs ». En effet, une étude menée sur la momie de Ramsès II, par le musée de l'Homme à Paris en 1976, a conclu que le pharaon était un « leucoderme, de type méditerranéen proche de celui des Amazighes africains86 ».Lors d'un colloque international organisé à Dakar du 26 février au 2 mars 1996 à l'occasion du dixième anniversaire de la mort de Cheikh Anta Diop87, l'anthropologue Alain Froment fit une communication ouvertement critique dans la continuité de ses précédents travaux88. En 1996 toujours, Xavier Fauvelle a publié un livre sur Cheikh Anta Diop conçu comme un bilan critique89. Pour l'égyptologue Jean Yoyotte, « Cheik Anta Diop était un imposteur. Un égyptologue incapable de lire le moindre hiéroglyphe »90.ŒuvresNations nègres et culture : de l'antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique noire d'aujourd'hui, 1954 (ISBN 2708706888).L'unité culturelle de l'Afrique noire, 1959 (ISBN 2708704060)L'antiquité africaine par l'image (ISBN 2708706594).L'Afrique noire précoloniale. Étude comparée des systèmes politiques et sociaux de l'Europe et de l'Afrique noire de l'Antiquité à la formation des États modernes (ISBN 2708704796).Les fondements culturels, techniques et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire, 1960 ; réédité par Présence africaine sous le titre Les fondements économiques et culturels d'un État fédéral d'Afrique Noire, 2000 (ISBN 2708705350).Antériorité des civilisations nègres : mythe ou vérité historique ?, 1967 (ISBN 2708705628).Parenté génétique de l'égyptien pharaonique et des langues négro-africaines, 1977.Civilisation ou barbarie, 1981 (ISBN 2708703943).Nouvelles recherches sur l'égyptien ancien et les langues africaines modernes, Présence africaine, Paris, 1988. Ouvrage posthume.
EBENEZER NJOH MOUELLENé le 17 Septembre 1938CamerounaisProfesseur d'Université, PhilosophieEtudes et formationNiveau Secondaire :Baccalauréat (Série Philosophie, Mention AB, 1959,Académie de Bordeaux)Niveau supérieurClasse de Lettres Supérieures au Lycée de garçons du Mans ( Sarthe)Classe Préparatoire à Normale Sup.de Saint Cloud au Lycée Henri IV, ParisLicence ès Lettres ,option Philosophie, Mention AB (Sorbonne)Diplôme d'Etudes Supérieures (D.E.S.), Mention TB (Sorbonne)Doctorat de 3°Cycle :L'Idée de Profondeur chez Bergson, Mention TB (Sorbonne)Doctorat d'Etat ès lettres et Sciences Humaines , ancien régime : L'humanité de l'avenir selon le bergsonisme, sous la direction de Vladimir Jankélévitch, Mention T.H.J'ai appartenu, pour ma formation primaire, à l'une des générations d'enfants ayant eu à passer préalablement par deux années de Cours Préparatoire (CP) en langue locale (Duala). Nous entamions le programme officiel du CP (I et II) au cours des 3e et 4e années réelles de la scolarisation initiale. Cela se passait dans les écoles confessionnelles, et, en l'occurence les écoles de la mission protestante française au Cameroun. Cette situation a été déplorée par les uns, applaudie par d'autres. Je crois que la toute première initiation scolaire en langue locale garantissait la consolidation de la personnalité de base de l'enfant avant le relatif dépaysement que pouvait entrainer plus tard sa scolarisation en français.A cette époque où le concours d'entrée en 6e était organisé au plan territorial (on ne disait pas encore national), beaucoup de candidats qui n'avaient jamais eu à être enseignés par des instituteurs "Blancs", donc français, ont été recalés pour avoir totalement raté l'épreuve de la dictée et du compte rendu de lecture à cause des intonations et des accents indéchiffrables du lecteurexaminateur "Blanc". C'est ainsi que :<<Ah! j'ai bel air>> devenait pour certains <<Ah je bêlais>>.Souvenirs d'école de base **• Quand je reviens à Bonabéké je me sens chaque fois envahi par un sentiment, toujours le même. Le sentiment de me trouver dans une sorte de rétrécissement de l'espace jadis perçu par mes yeux d'enfant comme l'Univers tout entier ! L'école primaire de la Mission Protestante Française de Bonabéké, celle que j'ai fréquentée du Cours Préparatoire au Cours Moyen Première Année et que dirigeait mon père Charles Mouellé, occupait en effet un « espace-univers » que j'ai du mal à retrouver aujourd'hui. Serait-ce parce que la petite case en tôles qui a abrité la famille Mouellé pendant ces années a disparu du paysage emportant avec elle tous ces moments de prières en famille, de repas pris ensemble, et de tas d'autres histoires de famille ? Elle n'est pas la seule à avoir disparu. Ont également disparu du paysage les cases des évangélistes Eben et Kouo qui se trouvaient dans la continuité de la nôtre. Le chantier de la nouvelle église en a pris globalement la place.• Il est aussi vrai que le mouvement de va-et-vient d'une population essentiellement mobile, celle des élèves arrivant dans le campus comme une marée montante le matin pour en repartir en marée descendante le soir devait ajouter au grossissement de la taille de cet espace mien. L'effet de ruche bourdonnante à certaines heures de la journée, notamment les périodes de recréation et de pauses de midi – quatorze heures, les fortes clameurs montant des nombreux terrains improvisés de football contribuaient à donner une enflure supplémentaire à ce monde, petit en réalité, comme nous l'étions nous-mêmes, mais si grand dans nos représentations, nos sensations, et nos imaginations.• J'ai envie de dire qu'il y avait de la vie en abondance dans cet univers. J'aimais particulièrement les moments des longues processions d'élèves marchant au pas cadencé et chantant de belles harmonies que leur enseignaient les musiciens de l'école. La plupart des maîtres de notre école avaient appris le solfège et jouaient souvent d'un instrument. Si mon père jouait de l'harmonium, Monsieur Mbimi, celui-là même qui m'a tenu au cours moyen Première année, jouait de la mandoline. Toute l'école défilait ainsi le lundi matin pour se rendre dans la chapelle à l'occasion du service religieux d'orientation spirituelle et morale des activités de la semaine. Il existait bien d'autres moments de respiration chantée de plein air. J'aimais grandement ces moments-là qui correspondaient ou semblaient correspondre à une sorte de mise au diapason de toute la communauté scolaire.• J'ai parlé de l'impression de rétrécissement de l'espace ; je dois dire que c'est au niveau de la chapelle que je l'ai ressentie encore plus fortement plusieurs années après. Elle m'avait toujours paru très grande. Après tout, n'absorbait-elle pas la totalité des effectifs de l'école pendant le culte des lundis et surtout lors des veillées de la fête de Noël ? C'est dire, pendant que j'y pense aujourd'hui, que les effectifs de l'école n'étaient peut-être pas si importants que le grouillement et le bourdonnement quotidiens des heures de détente pouvaient le laisser croire. A bien y réfléchir une seconde fois, quand je pense que chaque niveau ne comptait pas deux mais une seule classe, je me dis que décidément la relation de l'enfant à l'espace est très significativement conditionnée par le fait qu'il est encore « un petit » qui deviendra grand. Tandis que le petit voit tout « grand » autour de lui, le grand - adulte est celui qui remet chaque chose dans sa vraie dimension.• Nos classes étaient loin d'être surchargées, ce qui présentait l'avantage de faciliter le rythme de correction des compositions et autres épreuves des contrôles des vendredis conduisant à un nouveau classement et à une nouvelle distribution des places sur les bancs. Tous les lundis en effet, on affectait à chaque élève la place que la note obtenue au contrôle de vendredi pouvait lui valoir. Les premiers occupaient les premiers bancs, plus près du maître, tandis que les moins méritants étaient envoyés s'asseoir sur les derniers bancs.• Sur cette manière de procéder il y a eu des avis opposés ; en effet certains pédagogues estimaient que ce sont les moins bons élèves qu'il fallait asseoir sur les premiers bancs et envoyer les meilleurs au fond de la classe. Leur argument consistait à dire qu'en envoyant au fond de la classe les moins bons on les condamnait plus ou moins à persévérer dans leurs mauvais résultats. Ici, à Bonabéké, la règle n'avait pas changé avant le départ de tous ceux de ma génération. On continuait de réserver les premiers bancs aux premiers et meilleurs élèves de la classe.• Pour avoir démarré ma scolarisation en langue douala, j'ai le sentiment, comme bien d'autres, d'avoir fait le cours préparatoire deux fois d'affilée sans qu'il se soit agi d'un quelconque redoublement. Seulement, après avoir appris à compter et à lire en langue douala, il a fallu le faire en français. On ne peut cependant pas dire que ce fut strictement le même programme ; il n'empêche que ce système a allongé la durée de notre scolarité primaire en comparaison avec la durée de cette même scolarité à l'école publique encore appelée « école officielle ». Les pédagogues de la Mission protestante française ont estimé que ce système permettait la confirmation d'un enracinement préalable dans la culture locale. Enracinement destiné à réduire les effets d'un déracinement de ceux qui ne pouvaient rien appréhender de palpable quand on devait leur parler d'hiver froid, de flocons de neige, de printemps aux arbres bourgeonnants ou encore de feuilles mortes de l'Automne ! C'est pourquoi nous avons eu à passer par les livres de lecture et de leçons de choses en langue douala tels que le « Nimèlè bôlô » et le « Bona nyama na mbota ». Qui ne se souvient de la brève et affectueuse lettre qui est l'un des plus beaux textes par lequel se clôt le « Nimèlè bôlô » et qui s'intitule « Kalati Makonge a tiledinô nyango », (La lettre de Makongue à sa mère) ; « Iyo nya ndolo, o si panè mulema onyol'am.. » ; de la belle langue douala écrite par de brillants pédagogues et de bons connaisseurs de la langue et de la culture douala.• En réalité je ne regrette pas d'avoir suivi ce chemin même s'il laissait l'impression de créer du retard aux élèves des « écoles de la Mission ». Retard ici ? Avance là-bas ? Tout cela n'est-il pas apparu dans toute sa relativité par la suite ? Le fait est qu'à « l'école officielle » tout comme à l'école privée confessionnelle, nos livres de lecture étaient les mêmes, « Mamadou et Bineta », « Mon Ami Koffi » ou encore « Moussa et Gigla ». Les textes de René Maran étaient écrits dans une si belle langue française ! Jules Davesne, comme les autres inspecteurs L. Sonolet ou A. Pérès qui sont les auteurs de « Moussa et Gigla » n'avaient pu planter leur décor qu'en Afrique Occidentale française où ils avaient exercé en qualité d'inspecteurs de l'enseignement primaire français. Si le théâtre des opérations était l'Afrique, fût-elle plus largement occidentale, l'idéologie était celle de la francophilie prônée par ces inspecteurs coloniaux chargés de faire admirer et aimer la France par les petits nègres.• Les souvenirs sont désormais si lointains et Bonabéké n'a pas manqué de subir l'exode de ses populations vers Douala. Il n'empêche, Bonabéké a abrité une école dont toute l'histoire mérite d'être contée. A l'époque, je parle donc de la fin des années quarante et du début des années cinquante, ce gros village était fier de son école. Ce gros village vivait à l'image du tout Yabassi, lieu de rencontre de nombreux fonctionnaires de la période avant l'Indépendance.• La dimension religieuse de notre école d'antan était ce qui lui donnait ce « supplément d'âme » qui continue de la faire vivre dans nos esprits.source : http://njohmouelle.org/Ebénézer Njoh-Mouellé, né le 17 septembre 1938, est un philosophe et homme politique camerounais. Il est titulaire d'un doctorat d'État ès lettres et Sciences Humaines, délivré par la faculté de la Sorbonne.Il s'est rendu très rapidement célèbre par son premier livre De la médiocrité à l'excellence1 (1970), où il analyse les phénomènes qui entravent le développement du Cameroun et les moyens d'y échapper à terme. Ses démonstrations sont servies par une culture vaste prenant ses racines dans la philosophie grecque, romaine et européenne. Ce livre fait actuellement partie des ouvrages étudiés au programme de terminale du Cameroun. Il est publié par un éditeur camerounais: les éditions CLE.La popularité de son œuvre auprès des milieux lettrés a valu à Ebenezer Njoh-Mouellé de se voir proposer en 1990 une place de secrétaire général du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti de Paul Biya.Ebenezer Njoh-Mouellé s'est présenté en 1997 à la députation comme candidat du RDPC. Son élection et les difficultés inattendues qu'il rencontra, ainsi que son expérience parlementaire, le conduisirent à publier, en 2002, un livre intitulé , Député de la Nation. Celui-ci constitue un constat amer sur le rôle du clientélisme et de la fortune personnelle possédée par les candidats dans la politique camerounaise.Source : Wikipedia
ENO BELINGANé le 6 décembre 1935 Ebolowa, CamerounDécès : 9 mai 2004 (à 68 ans) à YaoundéNationalité : CamerounProfession : Musicologue, écrivainFormation : GéologieEno Belinga Samuel-Martin (né le 6 décembre 1935 à Ebolowa, décédé le 9 mai 2004) est un musicologue et écrivain camerounais, professeur de géologie des Universités.BiographieÉtudes secondaires et supérieures à Yaoundé et Strasbourg, doctorat en Géologie appliquée, thèse d'État 1972 sur la bauxite de la province de l'Adamaoua, successivement professeur des sciences, directeur de l'enseignement supérieure et doyen de la faculté des sciences de Dschang, musicologue, recherches et publications sur les musiques traditionnelles du Sud-Cameroun (mvet), essayiste et poète.Pour Eno Belinga, la musique du mvet bulu a pour base, les vibrations sonores. Ses éléments constitutifs sont le rythme, la mélodie, l'harmonie. Cette musique a pour but l'expression esthétique des sentiments (Essouma Long, La musique dans le mvet).En 1986, lors de la catastrophe du lac Nyos, Haroun Tazieff, vulcanologue et ministre délégué auprès du premier ministre, chargé de la Prévention des Risques naturels et technologiques majeurs (1984-86) est venu au Cameroun et a déclaré que le sinistre provenait de la projections naturel de gaz dans une région anciennement volcanique.Le Pr Eno Belinga n'a pas caché avec humour, que ce point de vue était celui du ministre, non celui du vulcanologue. Pour le Camerounais « au franc-parler » (Stella Engama), familier des tremblements de l'écorce terrestre dans son pays, il était certain que ces gaz n'avaient rien de naturel, mais procédaient d'une expérimentation militaire.En 1998, il devient conseiller perpétuel de l'association Les amis de la littérature, qui rassemble étudiants, journalistes et tout le public amoureux des belles lettres aux côtés d'autres membres fondateurs : Soundjock Soundjock, Jean Baptiste Obama, Jean-Marie Essomba, Danielle Elom, Anne Marthe Mvoto, Casimir Amougou, François Bala Essomba et bien d'autres (Stella Engama).Élevé au grade de Chevalier des Arts et Lettres par la République française en décembre 2000.Agriculteur dans l'âme, il détestait par dessus tout « la civilisation des villes ». Il adorait la nature et les oiseaux au point de leur consacrer un recueil de poèmes (Stella Engama).Homme de sciences minéralogiques qui aborde presque tous les genres littéraires à la manière d'un Gœthe (Fernando d'Almeida, « introduction aux Ballades et Chansons Africaines d'Eno Belinda », Les Éthiopiques, 1983), ses œuvres poétiques d'une très grande force, prennent racine dans l'Afrique profonde et sur la foi en l'homme et en la création (Jean-Claude Awono, président de la ronde des poètes, 27 mai 2008)..Œuvres principales• 1965 Littérature et musique populaire en Afrique Noire, Éditions Cujas• 1970 La Prophétie de Joal, Yaoundé, CLE• 1970 Découverte des chantefables beit-bulu-fang du Cameroun, Klincksieck• 1972 Masques Nègres, Yaoundé, CLE• 1974 Ballades et chansons camerounaises, CLE• 1975 La prophétie de Joal, suivie de Équinoxes, Clé• 1976 Cameroun, Lamaro• 1977 Introduction générale à la littérature orale africaine, Université´ de Yaoundé• 1977 L'explication de texte dans la littérature orale africaine, Presses universitaires de Yaoundé´• 1977 L'esthétique littéraire dans la littérature orale africaine, Presses universitaires de Yaoundé´• 1978 La littérature orale africaine, Classiques Africains• 1978 Poésies orales, Classiques Africaines• 1978 Écrivains, cinéastes et artistes camerounais, écrit avec Thérèse Baratte, Yaoundé, CEPER• 1978 Chansons et Ballades africaines, Yaoundé, CLE• 1978 Comprendre la littérature orale africaine, éd. Saint-Paul, Issy-les-Moulineaux• 1984 Géologie du Cameroun, Université de Yaoundé• 1999 La femme, le coq et les balafons-- et autres chantefables, Presses universitaires de Yaoundé´• 1999 Le Cameroun, mille siècles avant Jésus-Christ, ou, Les grands secret de la nature dans la merveilleuse histoire des sites touristiques du Cameroun, Presses universitaires de Yaoundé´
Valère EpéeValère Epée (Ebele Wei) Homme de culture et de lettres, il parle du "Tét' Ekombo 2007" qui se tient à Douala.Propos recueillis par Dippah KayesséDuala Manga Bell, un exemple de patriotismeQue prévoit cette année le calendrier des activités commémorant la pendaison en 1914 à Douala de Rudolf Duala Manga Bell?Cette année, les festivités s'étalent sur quatre jours. Tout a commencé hier, 8 août, avec le dépôt de gerbes sur les tombes de Rudolf Duala Manga Bell à Bonanjo, Adolf Ngosso Din au cimetière Njo-Njo et Richard Din Manga, mort bien plus tard, mais pour la même cause. Nous visiterons aussi et bien évidemment le site où Rudolf Duala Manga Bell a été pendu. Au cours des visites essentiellement méditatives, nous allons procéder à des rituels habituels c´est-à-dire des prières, l'hymne Tét'Ekombo (Père de la patrie). Puis, les jours suivants il est prévu un concert de musique religieuse, une conférence publique, une procession dans la ville et plusieurs autres attractions culturelles…Erigé en héros national par décret présidentiel depuis une vingtaine d'années, la commémoration du décès de Rudolf Duala Manga Bell reste malgré tout confiner au seul canton Bell…La fête Tét'Ekombo est célébrée tous les ans depuis 1936. Jadis fête du Ngondo, elle a cessé de l'être le jour où un de nos chefs traditionnels a pris sur lui la lourde responsabilité de déclarer que ce n'est qu'une fête du canton Bell. Et puis, tous les autres ont bêtement suivi alors que Rudolf Duala Manga Bell et les autres ne sont pas morts pour la cause du canton Bell mais pour le Cameroun tout entier. Nous aimerions bien que l'Etat, qui a fait de Rudolf Duala Manga Bell ce héros national, se penche davantage sur ce problème. A ce titre, c'est une prérogative de l'Etat d'aider à matérialiser cet héroïsme. N'oubliez pas que l'Etat a donné à une promotion de l'Ecole militaire inter armes de Yaoundé le nom Rudolf Duala Manga Bell. A défaut donc d'une intervention de l'Etat, Dieu merci, la famille royale et la communauté belloise ne l'ont pas oublié et lui rendent un hommage tous les ans.Qui était Rudolf Duala Manga Bell ?Généalogiquement, Rudolph Duala Manga Bell était le fils de Manga Ndumbé, l'architecte et le propriétaire de la Pagode à Bonanjo. De cette noble naissance, Rudolf Duala Manga Bell a surtout tiré des enseignements moraux, beaucoup de courage et de l'intérêt pour la nation. Son nom est évocateur de son héroïque combat face aux Allemands. Jusqu'à sa mort, il a lutté contre l'expropriation des Bellois dans le cadre d'un projet d'urbanisation des Allemands qui impliquait plutôt l'instauration de l'apartheid dans la ville de Douala. Il devrait avoir dans les cantons Bell, Akwa, Deido…un quartier blanc et un quartier noir. Sa pendaison en 1914 commence avec la lettre qu'il avait envoyée au sultan Njoya, roi des Bamoun, lui demandant d'unir leurs forces pour contrer le diabolique projet allemand. La même lettre de sensibilisation avait été envoyée à Henri Madolla à Kribi et Martin Paul Samba à Ebolowa. Malheureusement, le sultan Njoya va remettre ce courrier à un ecclésiaste allemand, qui, à son tour, va le transmettre au gouvernement colonial. Lequel va s'offusquer de ce que l'on a fini par qualifier de haute trahison sous prétexte qu'il voulait soulever le peuple camerounais contre l'empire allemand. Arrêté, il sera rapidement jugé puis pendu le lendemain, 8 août. D'autre part, c'était un homme de foi. Libéré pour aller faire ses adieux à sa famille, il a eu l'occasion de s'évader mais a tenu à mourir au nom du peuple.Que reste-il donc de l'héritage de Rudolf Duala Manga Bell ?C'est un gros point d'interrogation. A travers ces célébrations annuelles, le canton Bell voudrait poser à la conscience de tous, la question de ce que nous avons fait de l'héritage si précieux de ces martyrs héroïques pendus ou fusillés. Dans l'attitude responsable de Rudolf Duala Manga Bell, il y a ici une grande leçon à tirer pour les générations actuelles et futures. Autour de nous, difficile de retrouver un Rudolf Duala Manga Bell. En ces temps où les patriotes sont de plus en plus rares dans notre société où nos politiciens n'ont aucun respect pour la parole donnée. Après la seconde guerre mondiale, nous avons vu des organisations d'hommes telles que l'Upc et le Ngondo pleines de patriotes. Ces organismes considérés comme les principaux artisans de l'indépendance au Cameroun bombardaient les Nations unies de pétitions et envoyaient en permanence des délégations pour défendre notre cause.A Yaoundé, la statue de Charles Atangana a été érigée, à Ebolowa, celle de Martin Paul samba et, tout récemment à Eséka, celle de Um Nyobé. A quand un buste de Rudolf Duala Manga Bell à Douala?Une statuette ne suffit pas pour faire de quelqu'un un héros national ou encore la désignation d'une promotion. Il faut bien que l'Etat accompagne cette désignation d'actes concrets sur le terrain pour pouvoir donner à son décret tout son poids. C'est à lui qu'il revenait donc de prendre des initiatives, d'encourager les artistes à confectionner des effigies, des statues en mémoire de ces héros nationaux. A Eséka et à Ebolowa, ce sont les communautés qui se sont chargées de l'érection des statues, et le politique en a tiré profit. Nous avons néanmoins trouvé un artiste capable d'ériger une statue, un buste selon son inspiration. Les artistes savent bien à quel moment commence l'œuvre mais jamais à quel moment ils la termineront à cause des aléas de la vie.Source: MutationsLa Définition Originelle du Ngondo :Epée Valère nous laisse entendre que le mot ou concept Ngondo à l'origine désignait l' 'Assemblée Traditionnelle de ce même peuple. Je veux entendre par là, le peuple Sawa Douala de la région Littorale du Cameroun. L'auteur va un peu plus loin avec précaution en mentionnant que « ce nom aurait été celui du lieu où se réunissait cette assemblée, a savoir le banc de sable situé au confluent des rivières Ngondo (précisément) et Bessekè. »(ibid.) Il amplifie son explication sur les sources du Ngondo en relatant les notions qui, je cite : 'donnent plutôt l´explication par le sens de cordon ombilical, symbole par conséquent du lien qui unit à la manière d´un cordon ombilical tous les fils se réclamant de l´arbre généalogique faisant remonter au même ancêtre (cf. Valère EPEE: Le Paradis Tabou, page 133). Ceci pourrait se situer au moins trois siècles de notre ère selon l'auteur. Nous, nous retrouvons donc ici avec trois dimensions du Ngondo définit par Epée Valère. La première est conceptuelle: 'Assemblée Traditionnelle' des peuples Sawa Duala. La deuxième est spaciale (géographique), le lieu où se tenait ses assises: Les confluents du fleuve Ngondo. La troisième est la connectivité généalogique des peuples Sawa.Cependant, Moukouri Dina Manga Charles dans son article intitulé 'Le " Ngondo " et la " Civilisation de la croix' (2006) nous apporte une autre explication qui est somme toute encrée sur la notion non pas seulement de 'Rassemblement Traditionnel du peuple Duala', mais aussi comme étant le Ngond'a Duala de 1815 constitué sur la base d'un mouvement social (de pensée) qui résiste à la domination occidentale lors des colonisations.Il va plus loin en exposant qu' « à l'époque, il fallait lutter et résister contre l'oppression coloniale ; seul le " ngondo " a semblé être la solution et l'espoir. »(Ibid.) Car elle est, à cette époque difficile du Sawa land, la seule manière de résister à l'oppression de la colonisation. Il faut aussi remarquer que le Ngondo d'alors, « symbolisait à la fois " l'ordre " et le " mouvement " pour la recherche d'un consensus social. » Moukouri Dina Manga Bell (2006). Pour restituer les choses dans un contexte historique encore plus exact, l'auteur affirme que « le " ngondo " est né de la problématique du Kamerun " !… »Situation Historique du NgondoMoukouri Dina Manga Bell rappelle que cette situation historique du Ngondo c'est de prime abord « la période épique de l'épopée célèbre de la légende de " Malobe et Ngo-Minga " qui participe à l'illustration de l'idée conceptuelle du " ngondo "; en gestation vers la fin du XVIIème siècle. Ensuite la matérialisation de la volonté de ce " Mouvement " par la signature de l'acte du " traité du 12 juillet 1884 ". Volonté exprimant une " logique institutionnelle " aux fins de bâtir un peuple et une nation souveraine… » (Ibid.) De ce point de vu, le Ngondo serait donc en fait la base de l'idée d'un état et d'un gouvernement souverain dans le Sawa Land. Ce qui veut tout aussi dire que le Ngondo n'est non pas seulement l'assemblée du peuple Sawa Duala, mais aussi et surtout, la genèse de la pensée politique Sawa qui a à cette époque pour ambition première l'instauration et le maintien de l'ordre social et la gouvernance.L'auteur nous rappelle aussi que : « c'est ainsi que ce " mouvement " ou " ngondo ", s'assigna par ailleurs des missions de moralisation pour changer les mœurs décadents ; mais initia également des missions spécifiques d'organisation sociale ; d'ordre et de loi ; de liberté et de paix ; de justice et de sécurité ; de développement et d'émancipation des " sujets "… » Comme quoi, le Ngondo est alors à cette époque, un gouvernement civil ou alors une opposition à l'administration coloniale qui contribuera de façon décisive à la création de la nation Camerounaise. Car il faut remarquer que le Ngondo avait cette vocation civique et civile de régulation de la vie dans la société Sawa de l'ensemble des peuples Duala dans la région littorale du Cameroun..Aussi et surtout, Moukouri Dina Manga Bell nous donne ce détail percutant qui énonce que « c'est ainsi que ce " mouvement " patriotique des élites, princes et rois, décida de mettre fin au banditisme ambiant de l'époque ; de codifier et de rationaliser la " pensée " Sawa ; et par la suite de dénoncer et de combattre les comportements défaillants et déviants d'une société à la limite de la dérive. Dès lors, la " volonté " collective " de ce " mouvement ", emprunta résolument le cheminement institutionnel aux fins de créer un Etat souverain. » « Pour la toute première fois, on vit apparaître une " logique d'engagement " porteuse d'autorité et de discipline ; une " logique " idéologique et patriotique ayant des objectifs clairs et précis, confectionnés par une méthodologie propre, appliquée et patiente ; résumant un " idéal " de vie ; lequel idéal pour survivre, se devait un entourage de structures institutionnelles primaires certes, mais égales à celles de tout " gouvernement " légitime soucieux des populations et de ses intérêts publics. »(ibid.) Intéressant.Moukouri Dina Manga Bell rappelle que les choses se passerons donc contrairement au bon vouloir des promoteurs ou initiateurs du mouvement social 'Ngondo'a Sawa Duala' du Littoral. La transmission du pouvoir échappe à cette organisation sociale par des subterfuges conçues pour son démantèlement par les colons et quelques agents coloniaux. Par conséquent, les nouveaux hommes de pouvoir comme leurs prédécesseurs (les colons blancs) « refusent de 'reconnaître le ngondo comme " gouvernement " du peuple Sawa ; lui ôtant ses prérogatives d'autorité et de gestion dans tous les domaines. Tapis dans l'ombre des intrigues et de la médisance, ses détracteurs patentés s'acharnent à lui enlever aussi sa qualité exceptionnelle de porte-fanion du patriotisme et du nationalisme camerounais… ». (Ibid.) Il faut reconnaître que nous n'avons pas ici tous les détails des exactions, des crimes et génocides dont ont été victimes les Sawa Duala pour avoir tenu tête, d'abord à l'administration coloniale, mais aussi aux gouvernements initiés par ceux-ci conduit plu tard par des locaux.Néanmoins, vu l'aspect si important de l'action revendicatrice du mouvement social 'Ngond'a Duala,' on a vu surgir des manipulations de toutes natures passant de la création de concepts qui ainsi, allaient dénaturer l'aspect fondamental même du l'action du Ngondo. Cela crée des dichotomies sans précèdent qui perdurent jusqu'à nos jours. L'auteur émet pour cela des réserves et précise que «c'est pourquoi il ne serait pas vain de savoir ce que renferme aujourd'hui l'enveloppe: " assemblée traditionnelle du peuple Sawa ». Entendre par là, la nouvelle formulation du Ngondo actuel. Ce sont plus que des réserves, ce sont même des doutes. Ce concept ne serait t-il pas alors qu'une nouvelle désarticulation du concept initial du Ngondo pour plonger ce mouvement de pensée, dans ce que certains voudraient qu'il ne soit plus : c- a-d : un mouvement d'action social.Moukouri Dina Manga Bell va plus loin et plus fort d'ailleurs dans son propos en touchant à l'aspect frauduleux, corruptible qui étouffe désormais cette institution traditionnelle qu'est le Ngond'a Duala, aujourd'hui. Il se pose donc la question de savoir, si ce n'est qu' « une ineptie de plus ou une provocation-piège? Pour moi, je crois qu'il s'agit d'une " insulte civilisée " ; hybride et insipide ; renfermant une bonne dose d'inféodation culturelle à la coloniale. » (ibid.) Il faut voir ici que le Ngond'a Duala a eu pour premier détracteurs, toutes formes d'idéologies et théories scientifiques importées par la culture coloniale avec pour dessein de contrôler ou alors détruire toutes formes de résistances ou d'opposition à l'invasion occidentale. Désormais, cela facilité l'éclosion de mentalités corruptives dans le Sawa land ce qui fait dire avec justesse à Mokouri Dina Manga Bell que « le " ngondo " pouvait ressembler à tout, sauf à ce " conglomérat " d'ambitieux et de prétendants aux postes juteux du pouvoir ; ces déviationnistes culturels et ces chantres de la falsification de nos us et coutumes, regroupés de gré ou de force au sein de cette fameuse " assemblée traditionnelle du peuple Sawa "… » Parlant bien sur, du 'Ngondo traditionnel'. Cela ne surprendra pas grand monde, cette vérité est cinglante, elle est dévastatrice car c'est ici même que se meurt l'âme du peuple Sawa Duala résigné, qui tourne le dos à ses origines identitaires, son passé glorieux par des comportements empruntés, qui sont passés ici pour normes nouvelles.Moukouri Dina Manga Bell, qui ici reste dans cette logique de raisonnement d'un 'Ngondo traditionnel', je veux dire initial, se souvient que «le " ngondo " de nos ancêtres était bel et bien un mouvement patriotique ; un " gouvernement " destiné à servir le Kamerun ; et non cette " chose " anonyme " d'assemblée traditionnelle ", conçue (peut-être) pour se servir du Cameroun… » Ce qui veut tout simplement dire ici que la mission, les objectifs et visés actuels du Ngondo laissent tout de même assez perplexe, confus, dubitatif et même dans une frustration quasi permanente. Est-ce à cause de la nouvelle configuration socio politique et culturo économique du Cameroun ? Est-ce à cause de la gangrène, cette nouvelle façon d'être Camerounais ; cette corruption qui a pris place sur tout le tissu social du pays?L'ère du « Renouveau » avec le président de la République du Cameroun en la personne de son excellence Biya Paul, va sans nul doute percevoir ce malaise et ne restera pas passif devant cette situation importante du Ngond'a Sawa Duala. Ce qui fait observer à Moukouri Dina Manga Bell qui dit je site : « Fort heureusement, puisqu'il faut le dire, le président Biya, dans sa lecture du temps, comprit vite l'intérêt qu'avaient le Cameroun et son " Renouveau " à faire revivre le " ngondo " dans son " concept originel "…La réaction du président Biya Paul reconnaissons le, épouse alors ici avec son idéologie du 'Libéralisme Communautaire'. Moukouri Dina Manga Bell précise aussi que « c'est ainsi qu'à sa manière, pour " refonder " ce " concept ", le réhabiliter et le rétablir dans tous ses droits, ils prit l'acte majeur en faisant de Rudolf Duall'a Manga Bell et Paul Martin Samba des héros nationaux… » Il parle bien évidemment du président Biya. Du Ngondo interdit au temps du président Ahidjo Amadou, on voit un Ngondo libéré, mais qui doit se libérer davantage aujourd'hui de ses propres contradictions, s'auto psychanalyser de ses propres vieux démons qui ne sont rien d'autres que la création et la manipulation des faux concepts et leur fausse interprétation.L'auteur dit par ailleurs que « l'"affaire ngondo", puisqu'il faudra l'appeler ainsi, ne sera certainement pas une légende mais une très belle " aventure littéraire " qui alimentera pendant longtemps, nos esprits et plusieurs pages de l'oralité africaine. De cette complexité culturelle, naîtront de nouveaux critiques littéraires mieux armés et plus expérimentés, capables d'expliquer pourquoi notre dialectique culturelle a besoin des concepts de patriotisme et de nationalisme pour être complète et performante. »Moukouri Dina Manga (2006)Cependant l'auteur prévient en faisant allusions aux vieux démons du Ngond' a Duala, qu'il considère comme : « ces " cultures champignons " qui naissent par " scissiparité " et pour cause, dans nos villages n'ont rien de comparable au " ngondo " ; si ce n'est sa dimension folklorique. Par contre, presque toutes germent et fécondent avec des embryons de tribalisme laissés par nos anciens " maîtres ". En aucun cas, le " ngondo " valeur de rassemblement et de " culture " plurielle, ne peut être comparé à ces " attroupements saisonniers " de " fêtes campagnardes ", ou ressembler à un vulgaire " fourre-tout associatif ", folklorique sans objet et sans destination ; totalement dévoyé pour avoir abandonné à d'autres sa souveraineté intellectuelle, son patriotisme et son destin… » (ibid.)La nature actuelle du Ngondo interpelle donc tout un Sawa qui a du bon sens ou alors une intelligence pour réaliser qu'il y a urgence dans la demeure, comme le démontre ce riche et déterminant article de Moukouri Dina Manga Bell, qui jette un pavé, comme on en avait pas vu depuis si longtemps dans la mare. Il a raison de rappeler qu'on ne saurait par soucis de modernisation tout azimut vouloir faire du Ngondo, un carnaval comme celui de Rio. Il n'en est par ailleurs pas contre, moi pareillement. Seulement, le Ngondo comme vous le diront les anthropologues qui explorent le concept socialement construit du Ngondo et des carnavals vous feront remarquer qu'il faut ici faire attention, car la notion de Ngondo est pluridimensionnelle. Beaucoup de Sawa ne perçoivent pas toutes ses dimensions (du Ngondo séculaire). Ils se limitent à celles qui répondent à leurs besoins immédiat et non à ceux de son déploiement, de sa nature entière, intrinsèque même. C'est une représentation qui satisfait aux besoins des agents du néo-colonialisme international et 'local', sans oublier le néo-libéralisme sous la désignation de culture.Le Ngond'a Duala c'est un ensemble, un mouvement, une force qui est et qui sera l'inspiration à jamais, du déploiement de l'intelligence et la sagesse Sawa Duala, inspiratrice du 'Grand Sawa' contemporain et même du Cameroun qui avance, n'eut été les aléas et les turpitudes, vers des mutations nouvelles, auréolées d'espérance.Je tiens ici à remercier tout particulièrement mes congénères Sawa, aînés et contemporains les sieurs Moukouri Dina Manga Bell, Epée Valère, pour nous avoir offert ce fond de pensée d'une valeur épistémologique assez précieuse qui, ainsi, éclaircit un peu plus et fait courageusement avancer le débat Sawa pour un 'Grand Sawa contemporain' plus objectif et mieux socialement construit pour servir le Cameroun et non être servi par le Cameroun de ce 21 me siècle. Ca résume tout.A vous, nos chers (ères) fidèles visiteurs (ses) Sawa Duala du Premier Espace Social en ligne des peuples du 'Grand Sawa', (Bona Sawa) l'équipe d'animation se joint à moi pour vous souhaiter une agréable célébration du Ngondo 2006. Puisse le Ngond'a Duala originel, produit de la sagesse et l'intelligence de nos ancêtres vous inspirer en ces jours…EN CŒUR NOUS DISONS « NGOND'A DUALA O BWINDEA ! »